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THÉORIE DE LA TERRE.

autres petites élévations, on reconnoît facilement la base sur laquelle portent les rochers ; mais il n’en est pas de même des grandes montagnes ; non seulement le sommet est de rocher, mais ces rochers portent sur d’autres rochers ; il y a montagnes sur montagnes et rochers sur rochers, à des hauteurs si considérables, et dans une si grande étendue de terrain, qu’on ne peut guère s’assurer s’il y a de la terre dessous, et de quelle nature est cette terre. On voit des rochers coupés à pic qui ont plusieurs centaines de pieds de hauteur ; ces rochers portent sur d’autres qui peut-être n’en ont pas moins. Cependant ne peut-on pas conclure du petit au grand ? et puisque les rochers des petites montagnes dont on voit la base, portent sur des terres moins pesantes et moins solides que la pierre, ne peut-on pas croire que la base des hautes montagnes est aussi de terre ? Au reste, tout ce que j’ai à prouver ici, c’est qu’il a pu arriver naturellement, par le mouvement des eaux, qu’il

    mouvement et le sédiment des eaux dans un temps bien postérieur à celui de la formation des grandes montagnes produites par le feu primitif*. C’est dans ces pointes ou parties saillantes qui forment le noyau des montagnes, que se trouvent les filons des métaux : et ces montagnes ne sont pas les plus hautes de toutes, quoiqu’il y en ait de fort élevées qui contiennent des mines : mais la plupart de celles où on les trouve sont d’une hauteur moyenne, et toutes sont arrangées uniformément, c’est-à-dire par des élévations insensibles qui tiennent à une chaîne de montagnes considérable, et qui sont coupées de temps en temps par des vallées. (Add. Buff.)

    *L’intérieur des différentes montagnes primitives que j’ai pénétrées par les puits et galeries des mines, à des profondeurs considérables de douze et quinze cents pieds, est partout composé de roc vif vitreux, dans lequel il se trouve de légères anfractuosités irrégulières, d’où il sort de l’eau, des dissolutions vitrioliques et métalliques ; en sorte que l’on peut conclure que tout le noyau de ces montagnes est un roc vif adhérent à la masse primitive du globe, quoique l’on voie sur leur flanc, du côté des vallées, des masses de terre argileuse, des bancs de pierres calcaires, à des hauteurs assez considérables : mais ces masses d’argile et ces bancs calcaires sont des résidus du remblai des concavités de la terre, dans lesquelles les eaux ont creusé les vallées, et qui sont de la seconde époque de la nature. (Note communiquée par M. de Grignon à M. de Buffon, le 6 août 1777.)