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THÉORIE DE LA TERRE.

quantité de matières fluides, denses, et pesantes, mêlées, agitées, et confondues ensemble. Telle étoit la terre la veille des six jours ; mais dès le lendemain, c’est-à-dire dès le premier jour de la création, lorsque l’orbite excentrique de la comète eût été changée en une ellipse presque circulaire, chaque chose prit sa place, et les corps s’arrangèrent suivant la loi de leur gravité spécifique : les fluides pesants descendirent au plus bas, et abandonnèrent aux parties terrestres, aqueuses, et aériennes, la région supérieure ; celles-ci descendirent aussi dans leur ordre de pesanteur, d’abord la terre, ensuite l’eau, et enfin l’air ; et cette sphère d’un chaos immense se réduisit à un globe d’un volume médiocre, au centre duquel est le noyau solide qui conserve encore aujourd’hui la chaleur que le soleil lui a autrefois communiquée lorsqu’il étoit noyau de comète. Cette chaleur peut bien durer depuis six mille ans, puisqu’il en faudroit cinquante mille à la comète de 1680 pour se refroidir, et qu’elle a éprouvé en passant à son périhélie une chaleur deux mille fois plus grande que celle d’un fer rouge. Autour de ce noyau solide et brûlant qui occupe le centre de la terre, se trouve le fluide dense et pesant qui descendit le premier, et c’est ce fluide qui forme le grand abîme sur lequel la terre porteroit comme le liége sur le vif-argent ; mais comme les parties terrestres étoient mêlées de beaucoup d’eau, elles ont, en descendant, entraîné une partie de cette eau, qui n’a pu remonter lorsque la terre a été consolidée, et cette eau forme une couche concentrique au fluide pesant qui enveloppe le noyau : de sorte que le grand abîme est composé de deux orbes concentriques, dont le