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MANIÈRE D’ÉTUDIER

beaucoup plus ? Et cependant ils n’avoient pas fait comme nous des méthodes et des arrangements arbitraires : ils pensoient que la vraie science est la connoissance des faits, que pour l’acquérir il falloit se familiariser avec les productions de la nature, donner des noms à toutes, afin de les faire reconnoître, de pouvoir s’en entretenir, de se représenter plus souvent les idées des choses rares et singulières, et de multiplier ainsi des connoissances qui, sans cela, se seroient peut-être évanouies, rien n’étant plus sujet à l’oubli que ce qui n’a point de nom : tout ce qui n’est pas d’un usage commun ne se soutient que par le secours des représentations.

D’ailleurs, les anciens qui ont écrit sur l’histoire naturelle étoient de grands hommes, et qui ne s’étoient pas bornés à cette seule étude : ils avoient l’esprit élevé, des connoissances variées, approfondies, et des vues générales ; et s’il nous paroît, au premier coup d’œil, qu’il leur manquât un peu d’exactitude dans de certains détails, il est aisé de reconnoître, en les lisant avec réflexion, qu’ils ne pensoient pas que les petites choses méritassent une attention aussi grande que celle qu’on leur a donnée dans ces derniers temps ; et quelque reproche que les modernes puissent faire aux anciens, il me paroît qu’Aristote, Théophraste, et Pline, qui ont été les premiers naturalistes, sont aussi les plus grands à certains égards. L’Histoire des Animaux d’Aristote est peut-être encore aujourd’hui ce que nous avons de mieux fait en ce genre, et il seroit fort à désirer qu’il nous eût laissé quelque chose d’aussi complet sur les végétaux et sur les minéraux ; mais les deux livres des plantes, que quelques auteurs lui