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de quartz, de grès, etc. On trouve aussi de cette argile en petite quantité dans quelques glaises, mais l’origine des argiles blanches qui gisent en grandes masses ou en couches doit être attribuée à la décomposition immédiate des sables quartzeux, au lieu que les petites masses de cette argile qu’on trouve dans la glaise ne sont que des sécrétions de ces mêmes sables décomposés qui étaient contenus et mêlés avec les autres matières dans cette glaise, et qui s’en sont séparés par la filtration des eaux.

Il n’y a point de coquilles ni d’autres productions marines dans les masses d’argile blanche, tandis que toutes les couches de glaise en contiennent en grande quantité, ce qui nous démontre encore pour les argiles les mêmes procédés de formation que pour les grès : l’argile et le grès pur ont donc également été formés par la simple agrégation ou par la décomposition des sables quartzeux, tandis que les grès impurs et les glaises ont été composés de matières mélangées, transportées et déposées par le mouvement des eaux.

Et ce qui prouve encore que l’argile blanche est une terre dont l’essence est simple et que la glaise est une terre mélangée de matières d’essences différentes, c’est que la première résiste à tous nos feux sans éprouver aucune altération, et même sans prendre de la couleur, au lieu que toutes les glaises deviennent rouges par l’impression d’un premier feu, et peuvent se fondre dans nos fourneaux : de plus, les glaises se trouvent également dans les terrains calcaires et dans les terrains vitreux, au lieu que les argiles pures ne se rencontrent qu’avec les matières vitreuses ; elles sont donc formées de leurs détriments sans autre mélange, et il paraît qu’elles n’ont pas été transportées par les eaux, mais produites dans la place même où elles se trouvent, au lieu que toutes les glaises ont subi les altérations que le mélange et le transport n’ont pu manquer d’occasionner.

De la même manière qu’il ne faut pas confondre la marne ni la craie avec l’argile blanche, on ne doit pas prendre pour des glaises les terres limoneuses, qui, quoique grasses et ductiles, ont une autre origine et des qualités différentes de la glaise ; car ces terres limoneuses proviennent de la couche universelle de la terre végétale qui s’est formée des résidus ultérieurs des animaux et des végétaux : leurs détriments se convertissent d’abord en terreau ou terre de jardin, et ensuite en limon aussi ductile que l’argile ; mais cette terre limoneuse se boursoufle au feu, au lieu que l’argile s’y resserre, et de plus cette terre limoneuse fond bien plus aisément que la glaise même la plus impure.

Il est évident, par le grand nombre de coquilles et autres productions marines qui se trouvent dans toutes les glaises, qu’elles ont été transportées avec les dépouilles des animaux marins, et qu’elles ont été déposées et stratifiées ensemble par couches horizontales dans presque tous les lieux de la terre par les eaux de la mer ; leurs couleurs indiquent assez qu’elles sont imprégnées de parties minérales et particulièrement de fer, qui paraît leur donner toutes leurs différentes couleurs. D’ailleurs on trouve presque toujours entre les lits de glaise des pyrites martiales, dont les parties constituantes ont été entraînées de la couche de terre végétale par l’infiltration des eaux, et se sont réunies sous cette forme de pyrites entre les lits de ces argiles impures.

Le fer, en plus ou moins grande quantité, donne toutes les couleurs aux terres qu’il pénètre. La plus noire de toutes les argiles est celle qu’on a improprement appelée creta nigra fabrilis, et que les ouvriers connaissent sous le nom de pierre noire ; elle contient plus de parties ferrugineuses qu’aucune autre argile[1], et la teinte rouge ou rougeâtre

  1. « Lorsque la pierre noire a été exposée pendant quelque temps à l’air, elle s’exfolie en lames minces et se couvre d’une efflorescence d’un jaune verdâtre, qui n’est autre chose que du vitriol ferrugineux, et si on fait éprouver à cette argile, ainsi couverte de cette matière, la chaleur d’un feu modéré, seulement pendant quelques instants, elle devient bientôt rouge extérieurement et blanche à l’intérieur, parce que le vitriol s’en est séparé,