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Et de fait, les porphyres, qui n’ont pu se former qu’à la superficie des jaspes, sont infiniment moins communs que les granits, qui se sont au contraire formés sur la surface entière de la masse quartzeuse ; car les granits recouvrent encore aujourd’hui la plus grande partie du globe ; et, quoique les quartz percent quelquefois au dehors et se montrent en divers endroits sur de fortes épaisseurs et dans une grande étendue[1], ils n’occupent que de petits espaces à la surface de la terre en comparaison des granits, parce que les quartz ont été recouverts et rehaussés, presque partout, par ces mêmes granits, qui ont recueilli dans leur substance presque tous les débris des verres primitifs, et se sont consolidés et groupés sur la roche même du globe, à laquelle ils tiennent immédiatement, et qu’ils chargent presque partout. On trouve le granit comme premier fond au-dessous des bancs calcaires et des couches de l’argile et des schistes, quand on peut en percer l’épaisseur[2],

  1. « Les quartz s’offrent à plusieurs endroits dans les Vosges, soit que les masses de granits éboulées aient découvert les flancs de la masse quartzeuse, ou que des zones ou veines de quartz percent d’elles-mêmes à la surface. Dans les mines du Thillot et de Château-Lambert, fouillées dans une des racines de la grande montagne du Balon, et dont l’exploitation fut autrefois très riche et pourrait l’être encore, le cuivre se trouve immédiatement dans le quartz vif, sans autre matrice ni gangue ; ce quartz est d’un beau blanc de lait et perce en larges bandes jusqu’au dehors de la montagne. On rencontre la tranche d’une autre très large zone de quartz, coupée dans le bas de la superbe route qui descend de l’autre côté de cette même grande montagne du Balon sur Giromagny en haute Alsace. Des masses et des zones de quartz se présentent également sur les coupes de l’autre route qui pénètre la montagne, de Lorraine en Alsace, par la source de la Moselle, Bussang, Saint-Amarin et Than. Enfin, en nombre d’autres endroits dans toute la chaîne des Vosges, le quartz se montre entre les granits, soit à la base, soit aux côtés escarpés des montagnes. » Observations communiquées par M. l’abbé Bexon.

    « Dans le canton de Salvert en Auvergne, il y a, dit M. Guettard, une bande de plus de deux mille toises de long qui n’est que du quartz blanc ; elle reprend même du côté de Roche-d’Agout jusqu’à une petite butte qui est auprès de la paroisse de Biolet, ce qui fait en tout une longueur de plus de dix mille toises.

    Aux environs de Pont-Gibaud, le long du chemin de Clermont au Mont-Dore, il y a du quartz ; les maisons en sont bâties dans le canton de la Sauvetat, cette pierre est ordinairement d’un blanc plus ou moins vif, etc. » Mémoire sur la minéralogie d’Auvergne, dans ceux de l’Académie des sciences, année 1759.

    Presque tous les rochers du Grimsel (l’une des plus hautes Alpes, d’où sortent les sources de l’Aar et du Rhône) contiennent de beaux cristaux ; c’est sur cette montagne composée de quartz, qu’ont été trouvées les plus belles pièces de cristal que l’on connaisse, entre autres celle qu’a vue M. de Haller, et qui pesait six cent quatre-vingt-quinze livres. Voyages de M. Bourrit, t. II, chap. iii.

    On entrevoit de certaines lois à l’égard de l’arrangement respectif de cet ordre d’anciennes roches, par tous les systèmes de montagnes qui appartiennent à l’empire russe. La chaîne ouralique, par exemple, a du côté de l’orient, sur toute sa longueur, une très grande abondance de schistes cornés, serpentins et talqueux, riches en filons de cuivre, lesquels forment le principal accompagnement du granit. Des jaspes de diverses couleurs… forment des lits de montagnes entières et occupent de très grands espaces ; de ce même côté, il paraît beaucoup de quartz en grandes roches toutes pures. » Observ. sur la formation des montagnes, par M. Pallas, p. 50.

  2. « Les montagnes du Vicentin et du Véronois sont composées d’un schiste argileux micacé ; comme on n’en perce pas l’épaisseur, on ignore s’il en est de même ici que dans d’autres pays de montagnes, c’est-à-dire s’il y a au-dessous de ce schiste du granit, ce que je présume cependant ; car le granit perce et s’élève au-dessus du schiste dans les hautes montagnes du Tyrol, et le granit gris ou granitello se montre déjà vers les sources de la rivière de Cismonvé qui se jette dans la Brenta. » Ferber, Lettres sur la Minéralogie, p. 46.