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ils se sont réunis pour faire corps avec des matières qui leur sont analogues ; ils ont alors formé des masses plus ou moins tendres[1] : le crayon noir ou molybdène[NdÉ 1], la craie de Briançon[NdÉ 2], la craie d’Espagne[NdÉ 3], les pierres ollaires[NdÉ 4], les stéatites, sont tous composés de particules micacées qui ont pris de la solidité ; et l’on trouve aussi des micas en masses pulvérulentes, et dans lesquelles les paillettes micacées ne sont point agglutinées, et ne forment pas des blocs solides. « Il y a, dit M. l’abbé Bexon, des amas assez considérables de cette sorte de micas au-dessous de la haute chaîne des Vosges, dans des montagnes subalternes, toutes composées de débris éboulés des grandes montagnes de granité qui sont derrière et au-dessus. Ces amas de mica en paillettes ne forment que des veines courtes et sans suite ou des sacs isolés ; le mica y est en parcelles sèches et de différentes couleurs, souvent aussi brillantes que l’or et l’argent, et on le distribue dans le pays sous le nom de poudre dorée, pour servir de poussière à mettre sur l’écriture. »

» J’ai saisi, continue cet ingénieux observateur, la nuance du mica au talc sur des morceaux d’un granit de seconde formation, remplis de paquets de petites feuilles talqueuses empilées comme celles d’un livre, et l’on peut dire que ces feuilles sont de grand mica ou de petit talc ; car elles ont depuis un demi-pouce jusqu’à un pouce ou plus de diamètre, et elles ont en même temps une partie de la douceur, de la transparence et de la flexibilité du talc[2]. »

De tous les talcs le blanc est le plus beau[3] : on l’appelle verre fossile en Moscovie et en Sibérie où il se trouve en assez grand volume[4] ; il se divise aisément en lames

  1. « On trouve dans les cantons de Mandagoust, du Vignan, etc., qui font partie des Cévennes, des micas de différentes sortes, savoir, le jaune, le noir et le blanc… Ils sont unis pour la plupart à différents granités et à une pierre très dure, qui est une espèce de schiste, qui se trouve abondamment dans le lit d’une petite rivière qui passe au village de Costubayne, paroisse de Mandagoust. Le mica joint à cette pierre est tout blanc et fort transparent ; il donne à la pierre un brillant fort agréable dans sa cassure ; on pourrait, à cause de la dureté de cette pierre et du beau poli qu’elle prend, en faire tout ce qu’on fait avec nos marbres, et avec plus d’avantage, attendu qu’elle n’est pas calcinable, ne faisant aucune effervescence avec les acides. » Mémoires de l’Académie des Sciences, année 1768, p. 546.
  2. Mémoires sur l’Histoire naturelle de la Lorraine, communiqués par M. l’abbé Bexon.
  3. Le talc ordinaire est une espèce de pierre onctueuse, molle, nette, couleur de perle, qu’on peut aisément séparer eu lames qui, rendues minces, ont assez de transparence. On coupe sans peine le talc au couteau ; il se plie aussi ; il est glissant et comme gras à l’attouchement ; il se laisse difficilement briser ; il résiste à un feu assez véhément, sans souffrir de changement considérable, et aucun menstrue acide ni alcalin en forme humide ne vient à bout de le dissoudre. Wallerii Mineralog. Voyez aussi la Lithogéognosie de Pott.
  4. « Ce n’est qu’à l’an 1705 qu’on peut rapporter les premières recherches du talc, faites sur le fleuve Witim, en Sibérie : comme il fut trouvé d’une qualité supérieure, les mines les plus célèbres, exploitées jusqu’alors sur d’autres rivières, furent entièrement négligées… Le talc le plus estimé est celui qui est transparent comme de l’eau claire ; celui qui tire sur le verdâtre n’a pas à beaucoup près la même valeur ; on en a trouvé des tables qui avaient près de deux aunes en carré ; mais cela est fort rare : les tables de trois quarts ou d’une aune sont déjà fort chères, et se paient sur le lieu un ou deux roubles la livre ; le plus commun est d’un quart d’aune, il coûte huit à dix roubles le pied. La
  1. Sulfure de molybdène, substance qui n’a rien de commun avec le mica.
  2. Est formée de talc.
  3. C’est un carbonate de chaux ; elle n’a, par conséquent, aucune relation de parenté avec le mica.
  4. La pierre ollaire ou Topfstein est formée par un mélange d’écailles de chlorite et de talc, en proportions très variables. [Note de Wikisource : On connaît les pierres ollaires aussi sous le nom de stéatites. En somme, aucune des roches citées par Buffon n’est du mica.]