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Par leurs éruptions réitérées, elles ont comblé les vallées, couvert les plaines et même produit d’autres montagnes. Ensuite, lorsque les éruptions ont cessé, la plupart des volcans ont continué de brûler, mais d’un feu paisible et qui ne produit aucune explosion violente, parce qu’étant éloignés des mers, il n’y a plus de choc de l’eau contre le feu ; les matières en effervescence et les substances combustibles anciennement enflammées continuent de brûler, et c’est ce qui fait aujourd’hui la chaleur de toutes nos eaux thermales ; elles passent sur les foyers de ce feu souterrain et sortent très chaudes du sein de la terre : il y a aussi quelques exemples de mines de charbon qui brûlent de temps immémorial, et qui se sont allumées par la foudre souterraine ou par le feu tranquille d’un volcan dont les éruptions ont cessé ; ces eaux thermales et ces mines allumées se trouvent souvent comme les volcans éteints dans les terres éloignées de la mer.

La surface de la terre nous présente en mille endroits les vestiges et les preuves de l’existence de ces volcans éteints : dans la France seule, nous connaissons les vieux volcans de l’Auvergne, du Velay, du Vivarais, de la Provence et du Languedoc. En Italie, presque toute la terre est formée de débris de matières volcanisées, et il en est de même de plusieurs autres contrées. Mais pour réunir les objets sous un point de vue général, et concevoir nettement l’ordre des bouleversements que les volcans ont produits à la surface du globe, il faut reprendre notre troisième époque à cette date où la mer était universelle et couvrait toute la surface du globe à l’exception des lieux élevés sur lesquels s’était fait le premier mélange des scories vitrées de la masse terrestre avec les eaux : c’est à cette même date que les végétaux ont pris naissance et qu’ils se sont multipliés sur les terres que la mer venait d’abandonner ; les volcans n’existaient pas encore, car les matières qui servent d’aliment à leur feu, c’est-à-dire les bitumes, les charbons de terre, les pyrites et même les acides, ne pouvaient s’être formés précédemment, puisque leur composition suppose l’intermède de l’eau et la destruction des végétaux.

Ainsi les premiers volcans ont existé dans les terres élevées du milieu des continents, et à mesure que les mers en s’abaissant se sont éloignées de leur pied, leurs feux se sont assoupis et ont cessé de produire ces éruptions violentes qui ne peuvent s’opérer que par le conflit d’une grande masse d’eau contre un grand volume de feu. Or, il a fallu vingt mille ans pour cet abaissement successif des mers et pour la formation de toutes nos collines calcaires ; et comme les amas des matières combustibles et minérales qui servent d’aliment aux volcans n’ont pu se déposer que successivement, et qu’il a dû s’écouler beaucoup de temps avant qu’elles se soient mises en action, ce n’est guère que sur la fin de cette période, c’est-à-dire à cinquante mille ans de la formation du globe, que les volcans ont commencé à ravager la terre ; comme les environs de tous les lieux découverts