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ordinairement horizontales. Ces dernières ont donc été formées par le sédiment des eaux qui s’est déposé de niveau sur une base horizontale, tandis que les autres, puisqu’elles sont inclinées, semblent avoir été amenées par un courant sur un terrain en pente. Ces veines de charbon, qui toutes sont composées de végétaux mêlés de plus ou moins de bitume, doivent leur origine aux premiers végétaux que la terre a formés : toutes les parties du globe qui se trouvaient élevées au-dessus des eaux produisirent dès les premiers temps une infinité de plantes et d’arbres de toute espèce, lesquels, bientôt tombant de vétusté, furent entraînés par les eaux et formèrent des dépôts de matières végétales en une infinité d’endroits ; et comme les bitumes et les autres huiles terrestres paraissent provenir des substances végétales et animales, qu’en même temps l’acide provient de la décomposition du sable vitrescible par le feu, l’air et l’eau, et qu’enfin il entre de l’acide dans la composition des bitumes, puisque avec une huile végétale et de l’acide on peut faire du bitume, il paraît que les eaux se sont dès lors mêlées avec ces bitumes et s’en sont imprégnées pour toujours ; et comme elles transportaient incessamment les arbres et les autres matières végétales descendues des hauteurs de la terre, ces matières végétales ont continué de se mêler avec les bitumes déjà formés des résidus des premiers végétaux, et la mer, par son mouvement et par ses courants, les a remuées, transportées et déposées sur les éminences d’argile qu’elle avait formées précédemment.

Les couches d’ardoises, qui contiennent aussi des végétaux et même des poissons, ont été formées de la même manière, et l’on peut en donner des exemples, qui sont pour ainsi dire sous nos yeux[1]. Ainsi les ardoisières et les mines de charbon ont ensuite été recouvertes par d’autres couches de terres argileuses que la mer a déposées dans des temps postérieurs : il y a même eu des intervalles considérables et des alternatives de mouvement entre l’établissement des différentes couches de charbon dans le même terrain ; car on trouve souvent au-dessous de la première couche de charbon une veine d’argile ou d’autre terre qui suit la même inclinaison ; et ensuite on trouve assez communément une seconde couche de charbon inclinée comme la première, et souvent une troisième, également séparées l’une de l’autre par des veines de terre, et quelquefois même par des bancs de pierres calcaires, comme dans les mines de charbon du Hainaut. L’on ne peut donc pas douter que les couches les plus basses de charbon n’aient été produites les premières par le transport des matières végétales amenées par les eaux ; et lorsque le premier dépôt d’où la mer enlevait ces matières végétales se trouvait épuisé, le mouvement des eaux continuait de transporter au même lieu les terres ou les autres matières qui environnaient ce dépôt : ce sont ces terres qui forment aujourd’hui la veine intermédiaire

  1. Voyez le numéro 13 des notes justificatives des faits.