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et de là court de l’est à l’ouest pour rejoindre l’extrémité des Cordillères, au delà des lacs Sioux. 3o  Dans le grand continent de l’Europe et de l’Asie, qui non seulement n’est pas, comme ceux de l’Amérique et de l’Afrique, traversé par l’équateur, mais en est même fort éloigné, les chaînes des principales montagnes, au lieu d’être dirigées du sud au nord, le sont d’occident en orient : la plus longue de ces chaînes commence au fond de l’Espagne, gagne les Pyrénées, s’étend en France par l’Auvergne et le Vivarais, passe ensuite par les Alpes, en Allemagne, en Grèce, en Crimée, et atteint le Caucase, le Taurus, l’Imaüs, qui environnent la Perse, Cachemire et le Mogol au nord, jusqu’au Thibet, d’où elle s’étend dans la Tartarie chinoise, et arrive vis-à-vis la terre d’Yeço. Les principales branches que jette cette chaîne principale sont dirigées du nord au sud en Arabie, jusqu’au détroit de la mer Rouge ; dans l’Indoustan, jusqu’au cap Comorin ; du Thibet, jusqu’à la pointe de Malaca : ces branches ne laissent pas de former des suites de montagnes particulières dont les sommets sont fort élevés. D’autre côté, cette chaîne principale jette du sud au nord quelques rameaux, qui s’étendent depuis les Alpes du Tyrol jusqu’en Pologne ; ensuite depuis le mont Caucase jusqu’en Moscovie, et depuis Cachemire jusqu’en Sibérie ; et ces rameaux qui sont du sud au nord de la chaîne principale, ne présentent pas de montagnes aussi élevées que celles des branches de cette même chaîne qui s’étendant du nord au sud.

Voilà donc à peu près la topographie de la surface de la terre, dans le temps de notre seconde Époque, immédiatement après la consolidation de la matière. Les hautes montagnes que nous venons de désigner sont les éminences primitives, c’est-à-dire les aspérités produites à la surface du globe au moment qu’il a pris sa consistance ; elles doivent leur origine à l’effet du feu, et sont aussi par cette raison composées, dans leur intérieur et jusqu’à leurs sommets, de matières vitrescibles : toutes tiennent par leur base à la roche intérieure du globe, qui est de même nature. Plusieurs autres éminences moins élevées ont traversé dans ce même temps et presque en tous sens la surface de la terre, et l’on peut assurer que, dans tous les lieux où l’on trouve des montagnes de roc vif ou de toute autre matière solide et vitrescible, leur origine et leur établissement local ne peuvent être attribués qu’à l’action du feu et aux effets de la consolidation, qui ne se fait jamais sans laisser des inégalités sur la superficie de toute masse de matière fondue.

En même temps que ces causes ont produit des éminences et des profondeurs à la surface de la terre, elles ont aussi formé des boursouflures et des cavités à l’intérieur, surtout dans les couches les plus extérieures : ainsi le globe, dès le temps de cette seconde époque, lorsqu’il eut pris sa consistance et avant que les eaux n’y fussent établies, présentait une surface hérissée de montagnes et sillonnée de vallées ; mais toutes les causes subséquentes