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dont la période est d’environ cinq cent soixante-quinze ans, et celle de 1759, dont la période est de soixante-seize ans. On peut croire, en attendant mieux, qu’en prenant le terme moyen, trois cent vingt-six ans, entre ces deux périodes de révolution, il y a autant de comètes dont la période excède trois cent vingt-six ans qu’il y en a dont la période est moindre. Ainsi en les réduisant toutes à trois cent vingt-six ans, chaque comète aurait paru deux fois en six cent cinquante-deux ans, et l’on aurait par conséquent à peu près cent quinze comètes pour deux cent vingt-huit apparitions en six cent soixante-cinq ans.

Maintenant, si l’on considère que vraisemblablement il y a plus de comètes hors de la portée de notre vue, ou échappées à l’œil des observateurs qu’il n’y en a eu de remarquées, ce nombre croîtra peut-être de plus du triple, en sorte qu’on peut raisonnablement penser qu’il existe dans le système solaire quatre ou cinq cents comètes. Et s’il en est des comètes comme des planètes, si les plus grosses sont les plus éloignées du soleil, si les plus petites sont les seules qui en approchent d’assez près pour que nous puissions les apercevoir, quel volume immense de matière ! quelle charge énorme sur le corps de cet astre ! quelle pression, c’est-à-dire quel frottement intérieur dans toutes les parties de sa masse, et par conséquent quelle chaleur et quel feu produits par ce frottement !

Car, dans notre hypothèse, le soleil était une masse de matière en fusion, même avant la projection des planètes ; par conséquent ce feu n’avait alors pour cause que la pression de ce grand nombre de comètes qui circulaient précédemment et circulent encore aujourd’hui autour de ce foyer commun. Si la masse ancienne du soleil a été diminuée d’un six cent cinquantième[1] par la projection de la matière des planètes lors de leur formation, la quantité totale de la cause de son feu, c’est-à-dire de la pression totale, a été augmentée dans la proportion de la pression entière des planètes, réunie à la première pression de toutes les comètes, à l’exception de celle qui a produit l’effet de la projection, et dont la matière s’est mêlée à celle des planètes pour sortir du soleil, lequel par conséquent, après cette perte, n’en est devenu que plus brillant, plus actif et plus propre à éclairer, échauffer et féconder son univers.

En poussant ces inductions encore plus loin, on se persuadera aisément que les satellites qui circulent autour de leur planète principale, et qui pèsent sur elle comme les planètes pèsent sur le soleil, que ces satellites, dis-je, doivent communiquer un certain degré de chaleur à la planète autour de laquelle ils circulent : la pression et le mouvement de la lune doivent donner à la terre un degré de chaleur qui serait plus grand si la vitesse du mouvement de circulation de la lune était plus grande ; Jupiter, qui a quatre

  1. Voyez l’article qui pour titre : De la formation des planètes.