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de les faire sortir de leur sphère d’attraction, le ressort se rompt, parce que la force de la compression a été plus grande que celle de la cohérence, c’est-à-dire plus grande que celle de l’attraction mutuelle qui réunit les parties ; le ressort ne peut donc s’exercer qu’autant que les parties de la matière ont de la cohérence, c’est-à-dire, autant qu’elles sont unies par la force de leur attraction mutuelle, et par conséquent le ressort en général, qui seul peut produire l’impulsion, et l’impulsion elle-même, se rapportent à la force d’attraction, et en dépendent comme des effets particuliers d’un effet général.

Quelque nettes que me paraissent ces idées, quelque fondées que soient ces vues, je ne m’attends pas à les voir adopter ; le peuple ne raisonnera jamais que d’après ses sensations, et le vulgaire des physiciens d’après des préjugés : or il faut mettre à part les unes, et renoncer aux autres pour juger de ce que nous proposons ; peu de gens en jugeront donc, et c’est le lot de la vérité ; mais aussi très peu de gens lui suffisent, elle se perd dans la foule ; et quoique toujours auguste et majestueuse, elle est souvent obscurcie par de vieux fantômes, ou totalement effacée par des chimères brillantes. Quoiqu’il en soit, c’est ainsi que je vois, que j’entends la nature (et peut-être est-elle encore plus simple que ma vue) ; une seule force est la cause de tous les phénomènes de la matière brute, et cette force, réunie avec celle de la chaleur, produit les molécules vivantes desquelles dépendent tous les effets des substances organisées.