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70e degré est une entreprise digne de l’attention de la grande souveraine des Russies, et il faudrait la confier à un navigateur aussi courageux que M. Phipps. Je suis bien persuadé qu’on trouverait les deux continents réunis ; et s’il en est autrement, et qu’il y ait une mer ouverte au delà des îles Andrien, il me paraît certain qu’on trouverait les appendices de la grande glacière du pôle à 81 ou 82 degrés, comme M. Phipps les a trouvés à la même hauteur, entre le Spitzberg et le Groënland.

NOTES SUR LA SEPTIÈME ÉPOQUE.

(33) Page 122, ligne 10. Le respect pour certaines montagnes sur lesquelles les hommes s’étaient sauvés des inondations ; l’horreur pour ces autres montagnes qui lançaient des feux terribles, etc. Les montagnes en vénération dans l’Orient sont le mont Carmel, et quelques endroits du Caucase ; le mont Pirpangel au nord de l’Indoustan ; la montagne Pora dans la province d’Aracan ; celle de Chaq-pechan à la source du fleuve Sangari, chez les Tartares Mandchoux, d’où les Chinois croient qu’est venu Fo-hi ; le mont Altay à l’orient des sources du Selinga en Tartarie ; le mont Pecha au nord-ouest de la Chine, etc. Celles qui étaient en horreur étaient les montagnes à volcan, parmi lesquelles on peut citer le mont Ararath, dont le nom même signifie montagne de malheur, parce qu’en effet cette montagne était un des plus grands volcans de l’Asie, comme cela se reconnaît encore aujourd’hui par sa forme et par les matières qui environnent son sommet, où l’on voit les cratères et les autres signes de ses anciennes éruptions.


(34) Page 123, ligne 13. Comment des hommes aussi nouveaux ont-ils pu trouver la période lunisolaire de six cents ans ! La période de six cents ans, dont Josèphe dit que se servaient les anciens patriarches avant le déluge, est une des plus belles et des plus exactes que l’on ait jamais inventées. Il est de fait que prenant le mois lunaire de 29 jours 12 heures 44 minutes 3 secondes, on trouve que 219 mille 146 jours 1/2 font 7 mille 421 mois lunaires ; et ce même nombre de 219 mille 146 jours 1/2 donne 600 années solaires, chacune de 365 jours 5 heures 51 minutes 36 secondes ; d’où résulte le mois lunaire à une seconde près, tel que les astronomes modernes l’ont déterminé, et l’année solaire plus juste qu’Hipparque et Ptolémée ne l’ont donnée plus de deux mille ans après le déluge. Josèphe a cité comme ses garants Manéthon, Bérose et plusieurs autres anciens auteurs dont les écrits sont perdus il y a longtemps… Quel que soit le fondement sur lequel Josèphe a parlé de cette période, il faut qu’il y ait eu réellement et de temps immémorial une telle période ou grande année qu’on avait oubliée depuis plusieurs siècles, puisque les astronomes qui sont venus après cet historien s’en seraient servis préférablement à d’autres hypothèses moins exactes pour la détermination de l’année solaire et du mois lunaire, s’ils l’avaient connue, ou s’en seraient fait honneur, s’ils l’avaient imaginée[1].

« Il est constant, dit le savant astronome Dominique Cassini, que dès le premier âge du monde, les hommes avaient déjà fait de grands progrès dans la science du mouvement des astres : on pourrait même avancer qu’ils en avaient beaucoup plus de connaissances que l’on n’en a eu longtemps depuis le déluge, s’il est bien vrai que l’année dont les anciens patriarches se servaient fût de la grandeur de celles qui composent la période de six cents ans, dont il est fait mention dans les Antiquités des Juifs écrites par Josèphe. Nous ne trouvons dans les monuments qui nous restent des autres nations aucun vestige de cette période de six cents ans, qui est une des plus belles que l’on ait encore inventées. »

  1. Lettre de M. de Mairan au R. P. Parrenin. Paris, 1769, in-12, p. 108 et 109.