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dinaire d’une terre blanche et luisante, que les mineurs appellent quartz et qu’ils nomment spath lorsque cette terre est plus pesante, mais mollasse et feuilletée à peu près comme le talc : elle est enveloppée en dehors, vers le roc, de l’espèce de limon qui paraît fournir la nourriture à ces terres quartzeuses ou spatheuses ; ces deux enveloppes sont comme la gaine ou l’étui du filon ; plus il est perpendiculaire, et plus on doit en espérer ; et toutes les fois que les mineurs voient que le filon est perpendiculaire, ils disent qu’il va s’ennoblir.

» Les métaux sont formés dans toutes ces fentes et cavernes par une évaporation continuelle et assez violente ; les vapeurs des mines démontrent cette évaporation encore subsistante ; les fentes qui n’en exhalent point sont ordinairement stériles : la marque la plus sûre que les vapeurs exhalantes portent des atomes ou des molécules minérales, et qu’elles les appliquent partout aux parois des crevasses du roc, c’est cette incrustation successive qu’on remarque dans toute la circonférence de ces fentes ou de ces creux de rochers, jusqu’à ce que la capacité en soit entièrement remplie et le filon solidement formé ; ce qui est encore confirmé par les outils qu’on oublie dans les creux, et qu’on retrouve ensuite couverts et incrustés de la mine, plusieurs années après.

» Les fentes du roc qui fournissent une veine métallique abondante inclinent toujours ou poussent leur direction vers la perpendiculaire de la terre : à mesure que les mineurs descendent, ils rencontrent une température d’air toujours plus chaude, et quelquefois des exhalaisons si abondantes et si nuisibles à la respiration, qu’ils se trouvent forcés de se retirer au plus vite vers les puits ou vers la galerie, pour éviter la suffocation que les parties sulfureuses et arsenicales leur causeraient à l’instant. Le soufre et l’arsenic se trouvent généralement dans toutes les mines des quatre métaux imparfaits et de tous les demi-métaux, et c’est par eux qu’ils sont minéralisés.

» Il n’y a que l’or, et quelquefois l’argent et le cuivre, qui se trouvent natifs en petite quantité ; mais, pour l’ordinaire, le cuivre, le fer, le plomb et l’étain, lorsqu’ils se tirent des filons, sont minéralisés avec le soufre et l’arsenic : on sait, par l’expérience, que les métaux perdent leur forme métallique à un certain degré de chaleur relatif à chaque espèce de métal : cette destruction de la forme métallique, que subissent les quatre métaux imparfaits, nous apprend que la base des métaux est une matière terrestre ; et comme ces chaux métalliques se vitrifient à un certain degré de chaleur, ainsi que les terres calcaires, gypseuses, etc., nous ne pouvons pas douter que la terre métallique ne soit du nombre des terres vitrifiables. » Extrait du Mémoire de M. Eller, sur l’origine et la génération des métaux, dans le Recueil de l’Académie de Berlin, année 1753.


(16) Page 42, ligne 2. M. Lehman, célèbre chimiste, est le seul qui ait soupçonné une double origine aux mines métalliques ; il distingue judicieusement les montagnes à filons des montagnes à couches : « L’or et l’argent, dit-il, ne se trouvent en masses que dans les montagnes à filons ; le fer ne se trouve guère que dans les montagnes à couches : tous les morceaux ou petites parcelles d’or et d’argent qu’on trouve dans les montagnes à couches n’y sont que répandus, et ont été détachés des filons qui sont dans les montagnes supérieures et voisines de ces couches.

» L’or n’est jamais minéralisé ; il se trouve toujours natif ou vierge, c’est-à-dire tout formé dans sa matrice, quoique souvent il y soit répandu en particules si déliées, qu’on chercherait vainement à le reconnaître, même avec les meilleurs microscopes. On ne trouve point d’or dans les montagnes à couches ; il est aussi assez rare qu’on y trouve de l’argent ; ces deux métaux appartiennent de préférence aux montagnes à filons : on a néanmoins trouvé quelquefois de l’argent en petits feuillets ou sous la forme de cheveux, dans de l’ardoise : il est moins rare de trouver du cuivre natif sur de l’ardoise, et communément ce cuivre natif est aussi en forme de filets ou de cheveux.