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subsistante dans cette grosse planète ; mais que dans les treize autres, savoir : le quatrième satellite de Saturne, le quatrième satellite de Jupiter, Mercure, le globe terrestre, le troisième, le second et le premier satellite de Saturne, Vénus, l’anneau de Saturne, le troisième satellite de Jupiter, Saturne, le second et le premier satellite de Jupiter, la chaleur, quoique de degrés très différents, peut néanmoins convenir actuellement à l’existence des êtres organisés, et on peut croire que tous ces vastes corps sont, comme le globe terrestre, couverts de plantes et même peuplés d’êtres sensibles à peu près semblables aux animaux de la terre. Nous démontrerons ailleurs, par un grand nombre d’observations rapprochées, que dans tous les lieux où la température est la même on trouve non seulement les mêmes espèces de plantes, les mêmes espèces d’insectes, les mêmes espèces de reptiles sans les y avoir portées, mais aussi les mêmes espèces de poissons, les mêmes espèces de quadrupèdes, les mêmes espèces d’oiseaux sans qu’ils y soient allés ; et je remarquerai en passant qu’on s’est souvent trompé en attribuant à la migration et au long voyage des oiseaux les espèces de l’Europe qu’on trouve en Amérique ou dans l’orient de l’Asie, tandis que ces oiseaux d’Amérique et d’Asie, tout à fait semblables à ceux de l’Europe, sont nés dans leur pays, et ne viennent pas plus chez nous que les nôtres ne vont chez eux. La même température nourrit, produit partout les mêmes êtres, mais cette vérité générale sera démontrée plus en détail dans quelques-uns des articles suivants.

On pourra remarquer : 1o que l’anneau de Saturne a été presque aussi longtemps à se refroidir aux points de la consolidation et du refroidissement à pouvoir le toucher, que Saturne même, ce qui ne paraît pas vrai ni vraisemblable, puisque cet anneau est fort mince, et que Saturne est d’une épaisseur prodigieuse en comparaison ; mais il faut faire attention d’abord à l’immense quantité de chaleur que cette grosse planète envoyait dans les commencements à son anneau, et qui dans le temps de l’incandescence était plus grande que celle de cet anneau, quoiqu’il fût aussi lui-même dans cet état d’incandescence, et que par conséquent le temps nécessaire à sa consolidation a dû être prolongé de beaucoup par cette première cause ;

2o Que, quoique Saturne fût lui-même consolidé jusqu’au centre en 5 mille 140 ans, il n’a cessé d’être rouge et très brûlant que plusieurs siècles après, et que par conséquent il a encore envoyé dans les siècles postérieurs à sa consolidation, une quantité prodigieuse de chaleur à son anneau, ce qui a dû prolonger son refroidissement dans la proportion que nous avons établie : seulement il faut convenir que les périodes du refroidissement de Saturne, au point de la consolidation et du refroidissement à pouvoir le toucher, sont trop courtes, parce que nous n’avons pas fait l’estimation de la chaleur que son anneau et ses satellites lui ont envoyée, et que cette quantité de chaleur, que nous n’avons pas estimée, ne laisse pas d’être considérable, car l’anneau, comme très grand et très voisin, envoyait à Saturne dans le commencement, non seulement une partie de sa chaleur propre, mais encore il lui réfléchissait une grande portion de celle qu’il en recevait, en sorte que je crois qu’on pourrait, sans se tromper, augmenter d’un quart le temps de la consolidation de Saturne, c’est-à-dire assigner 6 mille 857 ans pour sa consolidation jusqu’au centre ; et de même augmenter d’un quart les 59 mille 911 ans que nous avons indiqués pour son refroidissement au point de le toucher, ce qui donne 79 mille 881 ans ; en sorte que ces deux termes peuvent être substitués dans la table générale aux deux premiers.

Il est de même très certain que le temps du refroidissement de Saturne, au point de la température actuelle de la terre, qui est de 130 mille 821 ans, doit par les mêmes raisons être augmenté non pas d’un quart, mais peut-être d’un huitième, et que cette période au lieu d’être de 130 mille 821 ans, pourrait être de 147 mille 173 ans.

On doit aussi augmenter un peu les périodes du refroidissement de Jupiter, parce que ses satellites lui ont envoyé une portion de leur chaleur propre, et en même temps une partie de celle que Jupiter leur envoyait ; en estimant un dixième le prolongement que cette