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Pour faire sur les satellites de Saturne la même évaluation que nous venons de faire sur le refroidissement de son anneau, nous supposerons, comme nous l’avons dit, que le premier de ces satellites, c’est-à-dire le plus voisin de Saturne, est de la grandeur de la lune, le second de celle de Mercure, le troisième de la grandeur de Mars, le quatrième et le cinquième de la grandeur de la terre. Cette supposition qui ne pourrait être exacte que par un grand hasard, ne s’éloigne cependant pas assez de la vérité pour que, dans le réel, elle ne nous fournisse pas des résultats qui pourront achever de compléter nos idées sur les temps où la nature a pu naître et périr dans les différents globes qui composent l’univers solaire.

Partant donc de cette supposition, nous verrons que le premier satellite étant grand comme la lune, a dû se consolider jusqu’au centre en 145 ans 3/4 environ, parce que n’étant que de 3/11 du diamètre de la terre, il se serait consolidé jusqu’au centre en 792 ans 3/4, s’il était de même densité ; mais la densité de la terre étant à celle de Saturne et de ses satellites : : 1 000 : 184, il s’ensuit qu’on doit diminuer le temps de la consolidation et du refroidissement dans la même raison, ce qui donne 145 ans 3/4 pour le temps nécessaire à la consolidation. Il en est de même du temps du refroidissement au point de pouvoir toucher sans se brûler la surface de ce satellite ; on trouvera par les mêmes règles de proportion qu’il aura perdu assez de sa chaleur propre pour arriver à ce point en 1 701 ans 16/25, et ensuite que, par la même déperdition de sa chaleur propre, il se serait refroidi au point de la température actuelle de la terre en 3 715 ans 87/125. Or, l’action de la chaleur du soleil étant en raison inverse du carré de la distance, la compensation que cette chaleur envoyée par le soleil a faite au commencement de cette première période, dans le temps de l’incandescence, a été 4/361/1250 et 4/361/50 à la fin de cette même période de 3 715 ans 87/125. Ajoutant ces deux termes 4/361/1250 et 4/361/50 de la compensation dans le premier et dans le dernier temps de cette période, on a 104/361/1250, qui, multipliés par 12 1/2, moitié de la somme de tous les termes, donnent 1300/361/1250 ou 3 217/361/50 pour la compensation totale qu’a faite la chaleur du soleil pendant cette première période de 3 715 ans 87/125. Et comme la perte totale de la chaleur propre est à la compensation totale en même raison que le temps de la période est à celui du prolongement du refroidissement, on aura 25 : 3 217/361/50 : : 3 715 ans 87/125 : 156 jours. Ainsi le prolongement du refroidissement de ce satellite, par la chaleur du soleil, n’a été que de 156 jours pendant cette première période.

Mais la chaleur de Saturne qui, dans le temps de l’incandescence, c’est-à-dire dans le commencement de cette première période, était 25, n’avait encore diminué au bout de 3 715 ans 87/125 que de 25 à 24 4/13 environ ; et comme ce satellite n’est éloigné de Saturne que de 66 900 lieues, tandis qu’il est éloigné du soleil de 313 millions 500 mille lieues, la chaleur envoyée par Saturne à ce premier satellite aurait été à la chaleur envoyée par le soleil, comme le carré de 313 500 000 est au carré de 66 900, si la surface que Saturne présente à ce satellite était égale à la surface que lui présente le soleil ; mais la surface de Saturne, qui n’est dans le réel que 90 1/4/11449 de celle du soleil, paraît néanmoins à ce satellite plus grande que celle de cet astre dans le rapport inverse du carré des distances ; on aura donc (66 900)² : (313 500 000)² : : 90 1/4/11449 : 173 102 environ ; donc la surface que Saturne présente à son premier satellite étant 173 mille 102 fois plus grande que celle que lui présente le soleil, Saturne dans le temps de l’incandescence était pour ce satellite un astre de feu 173 102 fois plus grand que le soleil. Mais nous avons vu que la compensation faite par