Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome I, partie 2.pdf/350

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.



ADDITIONS

À L’ARTICLE QUI A POUR TITRE : DES CAVERNES.



Sur les cavernes formées par le feu primitif.

Je n’ai parlé, dans ma Théorie de la Terre, que de deux sortes de cavernes, les unes produites par le feu des volcans et les autres par le mouvement des eaux souterraines : ces deux espèces de cavernes ne sont pas situées à de grandes profondeurs ; elles sont même nouvelles, en comparaison des autres cavernes bien plus vastes et bien plus anciennes qui ont dû se former dans le temps de la consolidation du globe ; car c’est dès lors que se sont faites les éminences et les profondeurs de sa superficie, et toutes les boursouflures et cavités de son intérieur, surtout dans les parties voisines de la surface. Plusieurs de ces cavernes produites par le feu primitif, après s’être soutenues pendant quelque temps, se sont ensuite fendues par le refroidissement successif qui diminue le volume de toute matière ; bientôt elles se seront écroulées, et, par leur affaissement, elles ont formé les bassins actuels de la mer, où les eaux, qui étaient autrefois très élevées au-dessus de ce niveau, se sont écoulées et ont abandonné les terres qu’elles couvraient dans le commencement : il est plus que probable qu’il subsiste encore aujourd’hui dans l’intérieur du globe un certain nombre de ces anciennes cavernes, dont l’affaissement pourra produire de semblables effets, en abaissant quelques espaces du globe, qui deviendront dès lors de nouveaux réceptacles pour les eaux ; et, dans ce cas, elles abandonneront en partie le bassin qu’elles occupent aujourd’hui pour couler par leur pente naturelle dans ces endroits plus bas. Par exemple, on trouve des bancs de coquilles marines sur les Pyrénées jusqu’à 1 500 toises de hauteur au-dessus du niveau de la mer actuelle. Il est donc bien certain que les eaux, dans le temps de la formation de ces coquilles, étaient de 1 500 toises plus élevées qu’elles ne le sont aujourd’hui ; mais, lorsqu’au bout d’un temps les cavernes qui soutenaient les terres de l’espace où gît actuellement l’Océan Atlantique se sont affaissées, les eaux qui couvraient les Pyrénées et l’Europe entière auront coulé avec rapidité pour remplir ces bassins, et auront par conséquent laissé à découvert toutes les terres de cette partie du monde. La même chose doit s’entendre de tous les autres pays : il paraît qu’il n’y a que les sommets des plus hautes montagnes auxquels les eaux de la mer n’aient jamais atteint, parce qu’ils ne présentent aucun débris des productions marines et ne donnent pas des indices aussi évidents du séjour des mers ; néanmoins comme quelques-unes des matières dont ils sont composés, quoique toutes du genre vitrescible, semblent n’avoir pris leur solidité, leur consistance et leur dureté que par l’intermède et le gluten de l’eau, et qu’elles paraissent s’être formées, comme nous l’avons dit, dans les masses de sable ou de poussière de verre qui étaient autrefois aussi élevées que ces pics de montagnes, et que les eaux des pluies ont, par succession de temps, entraînées à leur pied, on ne doit pas prononcer affirmativement que les eaux de la mer ne se soient jamais trouvées qu’au niveau où l’on trouve des coquilles ; elles ont pu être encore plus élevées, même avant le temps où leur température a permis aux coquilles d’exister. La plus grande hauteur à laquelle s’est trouvée la mer universelle ne nous est pas connue ; mais c’est en savoir assez que de pouvoir assurer que les eaux étaient élevées de 1 500 ou 2 000 toises au-dessus de leur niveau actuel, puisque les coquilles se trouvent à 1 500 toises dans les Pyrénées, et à 2 000 toises dans les Cordillères.

Si tous les pics des montagnes étaient formés de verre solide ou d’autres matières