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fort singulier, de l’espèce de ceux qu’on appelle spatagi, mais plus rond et plus uni ; les ruines du village d’Aïn-el-Mousa, et plusieurs canaux, qui servaient à y conduire de l’eau, fourmillent de coquillages fossiles. Les vieux murs de Suez et ce qui nous reste encore de son ancien port ont été construits des mêmes matériaux qui semblent tous avoir été tirés d’un même endroit. Entre Suez et Le Caire, ainsi que sur toutes les montagnes, hauteurs et collines de la Libye qui ne sont pas couvertes de sable, on trouve grande quantité de hérissons de mer, comme aussi des coquilles bivalves et de celles qui se terminent en pointe, dont la plupart sont exactement conformes aux espèces qu’on prend encore aujourd’hui dans la mer Rouge. (Idem. t. II, p. 84.) Les sables mouvants, qui sont dans le voisinage de Ras-Sem, dans le royaume de Barca, couvrent beaucoup de hérissons de mer et d’autres pétrifications que l’on y trouve communément sans cela. Ras-Sem signifie la « tête du poisson » et est ce qu’on appelle le village pétrifié, où l’on prétend qu’on trouve des hommes, des femmes et des enfants en diverses postures et attitudes, qui avec leur bétail, leurs aliments et leurs meubles ont été convertis en pierre ; mais, à la réserve de ces sortes de monuments du déluge, dont il est ici question, et qui ne sont pas particuliers à cet endroit, tout ce qu’on en dit, sont de vains contes et fable toute pure, ainsi que je l’ai appris non seulement par M. le Maire, qui, dans le temps qu’il était consul à Tripoli, y envoya plusieurs personnes pour en prendre connaissance, mais aussi par des gens graves et de beaucoup d’esprit qui ont été eux-mêmes sur les lieux.

« On trouve devant les Pyramides certains morceaux de pierres taillées par le ciseau de l’ouvrier, et parmi ces pierres on voit des rognures qui ont la figure et la grosseur de lentilles, quelques-unes même ressemblent à des grains d’orge à moitié pelés : or, on prétend que ce sont des restes de ce que les ouvriers mangeaient qui se sont pétrifiés, ce qui ne me paraît pas vraisemblable, etc. » (Idem.) Ces lentilles et ces grains d’orge sont des pétrifications de coquilles connues par tous les naturalistes sous le nom de pierre lenticulaire.

« On trouve diverses sortes de ces coquillages dont nous avons parlé aux environs de Maëstricht, surtout vers le village de Zichen ou Tichen, et à la petite montagne appelée des Huns. » (Voyez le Voyage de Misson, t. III, p. 109.)

« Aux environs de Sienne, je n’ai pas manqué de trouver auprès de Certaldo, selon l’avis que vous m’en avez donné, plusieurs montagnes de sable toutes farcies de diverses coquilles. Le Monte-Mario, à un mille de Rome, en est tout rempli ; j’en ai remarqué dans les Alpes, j’en ai vu en France et ailleurs. Olearius, Stenon, Cambden, Speed et quantité d’autres auteurs, tant anciens que modernes, nous rapportent le même phénomène. » (Idem, t. II, p. 312.)

« L’ile de Cérigo était anciennement appelée Porphyris à cause de la quantité de porphyre qui s’en tirait. » (Voyage de Thévenot, t. Ier, p. 25.) Or on sait que le porphyre est composé de pointes d’oursins réunies par un ciment pierreux et très dur.

« Vis-à-vis le village d’Inchené et sur le bord oriental du Nil, je trouvai des plantes pétrifiées qui croissent naturellement dans un espace de terre qui a environ deux lieues de longueur sur une largeur très médiocre ; c’est une production des plus singulières de la nature ; ces plantes ressemblent assez au corail blanc qu’on trouve dans la mer Rouge. » (Voyage de Paul Lucas, t. II, p. 380 et 381.)

« On trouve sur le mont Liban des pétrifications de plusieurs espèces, et entre autres des pierres plates où l’on trouve des squelettes de poissons bien conservés et bien entiers, et aussi des châtaignes de la mer Rouge avec des petits buissons de corail de la même mer. » (Idem, t. III, p. 326.)

« Sur le mont Carmel, nous trouvâmes grande quantité de pierres qui, à ce qu’on prétend, ont la figure d’olives, de melons, de pêches et d’autres fruits que l’on vend