Page:Brunet - Les hypocrites (1) - La folle expérience de Philippe, 1945.pdf/83

Cette page a été validée par deux contributeurs.
84
LA FOLLE EXPÉRIENCE

et c’était la dernière, sorte de victime burlesque de l’épistémologie. Ces problèmes philosophiques le préoccupèrent beaucoup, autant lorsqu’il revint à la foi qu’auparavant : avons-nous des instruments pour toucher la réalité ? Puis-je être assuré, dans un monde qui n’est qu’un monde de mots, de quoi que ce soit ? Il s’agrippa d’abord à une passion fugitive, puis, lorsque Dieu eut pitié de lui, il s’attacha à Dieu, sans plus chercher, ou plutôt ne cherchant plus que pour son amusement. Parce qu’il aimait les mots d’amour, Philippe était ennemi des concepts, et toute la vie de Philippe ne fut que la comédie de la nuit obscure des mystiques.

La saison avec Claire se passa tout comme la journée qui y mit la fin : il n’y eut que la fin qui en fit une variante, dont Philippe pensa mourir : on aurait dit qu’un instant, comme le dénouement s’accomplissait, Philippe fut vraiment amoureux pour justifier ces amours. Hélas, Philippe était surtout malade.

Le pharmacien du village ne lui faisait plus crédit, et Philippe devait s’acheminer vers le bourg voisin pour se munir de dôpe, la jaune dont il faisait un abus de plus en plus évident. Le pharmacien ne faisait plus crédit, parce que Philippe l’avait trompé, comme il trompait maintenant tout le monde, sans qu’il en eût conscience.

Alors Philippe passait devant la Vieille Maison où logeait le frère du Patron, le cour-