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LA FOLLE EXPÉRIENCE DE PHILIPPE

— Des débauchés ! Des cochons !

La tante Bertha aurait vomi. Devant sa poitrine, Philippe dit malicieusement :

— N’est pas débauché qui veut. Il y faut de l’estomac.

La tante Bertha comptait sans cesse l’argent de son sac à main. Elle amassait petit à petit l’argent de son assurance. Elle n’avait pas d’héritier, puisqu’un jour il faudrait bien que Philippe se débrouille, à moins qu’il ne veuille entrer dans les ordres, comme il le devrait (s’il se convertissait au moins !) : alors, elle amassait l’argent des messes, qui les privait tous deux du nécessaire aux fins de mois. D’autres célibataires ménagent toujours pour les enfants qu’ils n’ont pas.

Elle disait à Philippe, qui en grinçait des dents :

— Le travail est une chose sérieuse.

C’est qu’alors elle partait coller les timbres pour la souscription de la statue nouvelle qu’on destinait à la chapelle de saint Joachim.

Comme Florestine[1] la tante Bertha méprisait les grues, et Philippe la surprenait qui se mettait du rouge aux lèvres :

— Je n’ai pas le droit de faire peur, disait- elle, d’un air gêné.

Elle allait rendre compte au curé des feuillets qu’elle distribuait. Si le curé ne riait jamais

  1. Voir le Mariage blanc d’Armandine.