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LA TANTE BERTHA

La tante Bertha était venue voir Philippe à l’hôpital, et, riche d’un petit capital, elle avait recueilli Philippe chez elle. La présence de la tante Bertha suffit à rendre vie à Philippe, qui avait à exercer sa critique, et la tante Bertha en son genre était un résumé de toute une petite humanité : ensuite cette présence lui était un tel agacement que, par cet agacement, Philippe payait largement son écot.

La tante Bertha, c’était Marthe qui bâcle son ménage et sa vaisselle pour se donner un petit bout de Marie. Elle faisait tout à l’avance pour donner plus de temps à ses rosaires. Comme un prêtre son bréviaire, cette bigotte anticipait le repas du soir, quand on n’avait pas mangé celui du matin. Dans la cuisine, la table était mise pour le petit déjeuner et le rôti de six heures était déjà au four. Un peu plus, cette dévote aurait biné. Au fait, elle cuisait la viande du dîner, et elle oubliait que Philippe mangeait aussi le matin.

La tante Bertha était trop pressée. Elle ne portait pas ses innombrables prières, comme d’autres ne portent pas la boisson.

Parce qu’il n’avait pas parlé depuis des jours, Philippe se mettait à conter, sans y songer, une histoire grivoise. La tante Bertha rougissait, elle allait éclater :