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LA FOLLE EXPÉRIENCE

et qui, pour ainsi dire, faisait le lit du Philippe futur, lorsque parut son ami Pierre, qui tournait la porte.

Serviette sous le bras, vêtu avec la recherche du commis voyageur déchu d’une autre classe, Pierre, le visage tiré, était visiblement très gris. Philippe sauta sur la chance, craignant pourtant que Pierre, selon ses habitudes, fût sans le sou autant que lui. Cela prit tout de suite la couleur de ses sentiments actuels et Philippe se dit qu’il ferait le bon Samaritain et conduirait Pierre chez lui.

C’est à peine si d’abord Pierre le reconnut, Effondré dans sa chaise, il penchait la tête, puis se redressait, relevant un instant le front, regardant Philippe :

— Philippe, Philippe…

Puis il retombait.

— Relève-toi, relève-toi, tu sais qu’on peut appeler la police. Viens en bas, te baigner la tête d’eau froide.

Empoignant sa serviette, Pierre se laissa emmener. Devant le miroir et l’émail du lavabo, il revint à lui :

— Si on prenait un coup… J’en ai, tu sais.

Il restait en équilibre, adossé au mur, et il cherchait dans ses poches. Enfin apparut la gourde :

— Tu en as suffisamment, Pierre, je vais te verser un fond de verre seulement.

Il fit comme il disait et but le reste à même