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sensibles disaient qu’il faisait pitié à voir. Un jour que je lui parlais, il avoua :

— Vous regardez mon lorgnon ? Je le sais, il y a un verre de fêlé, mais c’est comme ça, quand on n’est pas riche, il faut attendre que l’argent rentre.

Et, par habitude, il me semblait, le binocle se redressait sur le nez long. Il y avait pourtant de l’inquiétude dans le regard de monsieur Lapointe.

Tout cela finit bien mal en effet. Paul était un mauvais gars et ce n’est pas monsieur Lapointe et ses gâteries qui pouvaient le changer. Il faillit passer en cour juvénile, et monsieur Lapointe crut en mourir. Une querelle d’adolescents, où Paul avait renversé un gamin plus jeune que lui et qui s’était brisé le bras. La croix du binocle n’était que douceur auprès des angoisses qu’eut à pâtir monsieur Lapointe. Cela lui coûta deux beaux mille piastres de l’héritage de Paul.

— Comme le répétait le bon père Hurteau, on est toujours puni par là où l’on a péché : j’ai trop aimé mon enfant.

La punition continua. Paul s’enfuit une première fois. Deux semaines durant, en dépit