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— Il dépense avec les mauvaises femmes. Il ne me donne pas ce qu’il me faut. On va se séparer et il me paiera une pension.

Elle était décidée d’aller voir un avocat, au risque d’entamer son compte de banque. Ça en valait la peine.

Car, décidément, ça allait de mal en pis. Et Ferdinand pouvait-il supporter cela, lui ? Il ne savait à quel saint se vouer, et le plus cocu des maris n’a jamais regretté son mariage autant que Ferdinand. Armandine lui parlait à peine. Un matin, l’imagination saugrenue lui vint d’acheter de l’iode et de forger un drame. Il plaça le flacon dans le garde-manger et appela Armandine :

— Regarde, Armandine, il y a du monde qui m’en veut. Ils ont voulu m’empoisonner. Ils sont venus ici.

Sans dire mot, Armandine s’empara de la bouteille et jeta le contenu dans l’évier. Selon son expression, Ferdinand ne savait où se mettre. Tout pieux qu’il se croyait, tout craintif qu’il fût, il rêvait au suicide. Cet homme qu’il connaissait, par exemple, et qui, un matin que, trop peu dégrisé pour affronter son travail, s’était empoisonné.