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demande, nous fîmes un grand détour, « parce qu’il avait envie de marcher » : nous n’aurions pas la malchance de la rencontrer.

C’est par recoupements et racontars, que je finis par reconstituer cette maison, cette famille. Maurice restait la discrétion même, et vous ai-je dit que, dans les premiers temps, il me demandait toujours, lorsque nous arrivions près de chez lui, de prolonger notre marche ? Je suis sûr qu’il hésita longtemps avant de me faire pénétrer dans leur logement. J’y étais entré une première fois par une raison qui était presque une effraction. Il n’était pas au collège depuis une semaine. Nous n’en avions aucune nouvelle et, bien entendu, ils ne possédaient pas de téléphone. Le professeur m’avait donc demandé d’aller le voir. Maurice était malade. Il se leva quand même : aurait-il pu me recevoir dans une chambre sale ? La plus belle de la maison, cependant ! Et, lorsqu’il était revenu au collège, il m’avait boudé quelques jours, faisant route avec un autre qui n’aurait pas l’idée, celui-là, de le relancer chez lui. Il me dit enfin, d’un ton rageur :

— Puisque tu connais le chemin, viens me chercher, le dimanche, chez nous.