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et sa comptabilité. Sous la lampe, il lui arrivait souvent d’écourter ses nuits, plongé dans ses calculs. Des rêves s’ébauchaient dans ce réduit. À terre il y avait un tas de journaux financiers américains, soigneusement empilés, la seule dépense d’Arthur, sa tentation étant de faire une fortune rapide à la bourse. Rockefeller le vieux et Carnegie furent ses héros, et, parce que son chat se montrait fort adroit à prendre les souris, il avait eu la fantaisie de l’appeler John D. Les chalands ne comprenaient pas.


Jamais il ne sortait, si ce n’est le dimanche, fidèle qu’il resta toujours à la messe. Il marchait jusqu’à l’église des Franciscains, parce que cette église était pieuse et aussi parce qu’on n’y quêtait pas. Non point que Pesant se refusât à toute charité : les victuailles qu’il ne pouvait vendre, il les apportait, en un gros paquet ficelé dans de la gazette, aux petites sœurs des pauvres, quand il se rendait à la messe. C’était sur son chemin. À la sœur, il débitait toujours la même plaisanterie :

— Je vous demande pas de reçu, ma sœur. Votre chapelet sera votre I.O.U. De l’autre côté, le bon Dieu me paiera mes intérêts.