Page:Brunet - Le mariage blanc d'Armandine, contes, 1943.djvu/11

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
15
D’ARMANDINE

— J’étais certaine que vous finiriez par là.

Pourquoi ? Jamais il ne plaisantait avec les femmes, et c’est à peine s’il riait, lorsque, d’aventure, il entendait des contes polissons. Ce rire était forcé et, déclenché, il ne s’arrêtait plus. Il avait honte, des semaines durant. Embarqué maintenant, il regrettait déjà.

Je n’ai pas dessein de me pencher sur la profondeur de ces âmes. Je laisse aux satiriques le soin de s’extasier sur l’âme des imbéciles. Ferdinand était une créature de Dieu, je le confesse : confessez en retour que la création est diablement déchue et que le péché originel a passé comme une blitzkrieg.

Vous dirais-je que jamais Ferdinand ne s’inquiéta sur le genre de femmes qui était le sien ? Sans avoir conscience nette de ses goûts, ce nez mince et long savait pourtant qu’il aimait les grosses nourritures. Savait-il qu’il aimait les petites femmes grasses ? Se le demander l’aurait fait rougir. Par manque d’habitude, il serait resté coi et pudique. La maigreur parfaite d’Armandine lui était donc un alibi. Ferdinand se croyait un dévot et la mortification des crétins peut avoir de ces complications.