Page:Bronte - Shirley et Agnes Grey.djvu/773

Cette page a été validée par deux contributeurs.

en fût ainsi, je suis un peu exigeant dans le choix d’une compagne de toute ma vie, et peut-être n’en trouverais-je pas une qui me convienne parmi les ladies dont vous parlez.

— Si vous demandez la perfection, vous ne la trouverez jamais.

— Je ne la demande pas ; je n’ai aucun droit de la demander, étant si loin moi-même d’être parfait. »

Notre conversation fut alors interrompue par un chariot de bains qui roulait à côté de nous, car nous étions arrivés à l’endroit de la plage où il y avait le plus de mouvement, et pendant huit ou dix minutes nous marchâmes au milieu de chariots, de chevaux, d’ânes et d’hommes, et nous ne pûmes reprendre notre causerie que lorsque nous fûmes arrivés à la route rapide qui monte vers la ville. Mon compagnon m’offrit alors son bras, que j’acceptai, sans avoir pourtant l’intention de m’en servir comme appui.

« Vous ne venez pas souvent sur la plage, me dit-il, car je m’y suis promené bien des fois, matin et soir, depuis mon arrivée ici, et jamais je ne vous ai aperçue avant ce jour. Souvent aussi, en traversant la ville, j’ai cherché votre école, mais je ne pensais pas aux maisons qui bordent la route à l’entrée de la ville, et une fois ou deux je me suis informé, sans obtenir la réponse que je cherchais. »

Quand nous fûmes arrivés au haut de la pente, je voulus dégager mon bras du sien, mais une légère pression du coude me fit voir qu’il ne le voulait pas, et j’y renonçai. En discourant sur divers sujets, nous entrâmes dans la ville et traversâmes plusieurs rues. Je vis qu’il se détournait de son chemin pour m’accompagner, quoiqu’il eût encore une longue marche devant lui ; et, craignant qu’il ne se retardât pour un motif de politesse, je lui dis :

« Je crains de vous détourner de votre chemin, monsieur Weston ; je crois que la route de F… est dans une direction tout opposée.

— Je vous quitterai au bout de la prochaine rue.

— Et quand viendrez-vous voir maman ?

— Demain, s’il plaît à Dieu. »

Le bout de la prochaine rue était à peu près la fin de ma promenade. Il s’arrêta là pourtant, me souhaita le bonjour, et appela Snap, qui parut un instant embarrassé de savoir s’il