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Chacun d’eux est armé d’une trique ; et il est bien probable que le maître sera en observation à la fenêtre du parloir, pour voir s’ils remplissent ses ordres.

Les jardiniers et le cocher étaient là en effet ; mais Linton était avec eux ; déjà ils étaient entrés dans la cour. Après réflexion, Heathcliff résolut d’éviter une lutte contre ces inférieurs. Il saisit le tisonnier, écrasa le loquet de la porte intérieure, et parvint à s’échapper au moment où ils entraient.

Madame Linton, très excitée, m’ordonna de l’accompagner en haut. Elle ne savait pas la part que j’avais prise dans cette histoire, et j’étais fort préoccupée de la garder dans son ignorance.

— Je suis à peu près folle, Nelly ! s’écria-t-elle en se jetant sur le sopha. Un millier de marteaux battent dans ma tête. Dites à Isabella de m’éviter : c’est à elle qu’est dû tout ce tapage, et si elle ou quelque autre aggravait ma colère en ce moment, j’entrerais en fureur. Et, Nelly, dites à Edgar, si vous le voyez aujourd’hui, que je suis en danger d’être sérieusement malade. Je voudrais que ce soit vrai. Il m’a choquée et désolée affreusement. Je veux qu’il prenne l’alarme. De plus, il serait capable de venir et de commencer un chapelet de reproches et de plaintes ; je ne manquerais pas de récriminer, et Dieu sait où nous finirions. Voulez-vous faire comme je vous dis, ma bonne Nelly ? Vous êtes témoin que je ne suis pas à blâmer dans cette affaire. Quel démon l’a pris de se mettre à écouter aux portes ? Les discours d’Heathcliff étaient très outrageants, après que vous nous avez quittés ; mais j’aurais vite fait de le détourner d’Isabella, et le reste n’avait pas d’importance. Maintenant tout est remis au pire, par cette folle envie d’entendre dire du mal de soi, qui hante certaines gens comme un démon ! Si Edgar n’avait pas écouté notre conversation, il n’en serait jamais résulté au-