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SOUVENIRS D’UNE MORTE VIVANTE

Elle reçut de nouveau un ordre de comparution ; cette fois elle se présenta. Le procureur-général la questionna longuement ; lorsqu’il vit qu’il n’obtenait pas de réponse qui pût le satisfaire, il accusa ma mère d’avoir prêté à un certain M. Crémieux les papiers de mon père, dont ce monsieur avait été trouvé détenteur au moment de son arrestation à Bruxelles.

Nous avons su plus tard que M. Crémieux avait déclaré avoir trouvé ce passeport dans une des rues de Bruxelles. Cela n’empêcha pas la préfecture de police de faire une enquête.

Ma mère ne connaissait pas M. Crémieux, elle pouvait donc répondre en toute connaissance de cause et avec assurance.

Ma mère ne savait pas ce que cela voulait dire, elle a soutenu qu’elle ne connaissait personne à Bruxelles et qu’elle ne connaissait pas davantage M. Crémieux.

— Où est votre mari ? lui demanda le procureur.

— Pardon monsieur, vous êtes sans doute mieux renseigné que moi. Je serais bien heureuse si vous vouliez me l’apprendre. Depuis son départ je n’ai jamais entendu parler de lui ni de personne.

— On sait, madame, qu’on n’obtiendra des renseignements de vous que par la force, que vous étiez encore plus exaltée que votre mari. Nous savions jour par jour, heure par heure, ce qui se passait chez vous, les discussions qu’il y avait, les journaux qu’on y lisait, et les personnes qui s’y réunissaient.

— Puisque vous êtes si bien renseigné, pourquoi toutes vos questions ?