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DEUXIÈME PARTIE

restaient encore ; ma pauvre maman restait sans argent, et tout une vie nouvelle à faire. Heureusement que mon père avait pris toutes les précautions ; le notaire s’était hâté de payer nos fournisseurs et ma pension, après avoir remis une somme assez importante à mon père, lequel en avait besoin, car il allait à l’inconnu, et il était loin de se douter qu’on mettrait l’embargo sur la somme qui était destinée à ma mère.

Le 6 décembre, Montargis lutta avec une grande énergie, les femmes mêmes marchaient à la tête d’un groupe composé de 450 citoyens, parmi lesquels se trouvaient les citoyens Zanotte, chef de bataillon de la Garde Nationale, Souesmes, conseiller général du canton de Montargis ; les citoyens Magie, Gérault, Gaulier, et une femme, mère de famille, portait le drapeau tricolore sur lequel était inscrit : Respect à la propriété ! Le brigadier de Nogent somma le rassemblement de s’arrêter :

— Nous défendons notre droit, répondirent-ils, nous défendons la constitution, et l’on continua d’avancer.

Le brigadier mit en joue M. Souesmes, qui était à la tête.

— Mais vous voyez bien que nous sommes inoffensifs ! s’écria-t-il, et il saisit la baïonnette de la carabine pour écarter le coup.

Le brigadier fit feu ; la balle alla tuer un jeune homme qui portait un drapeau tricolore. Le brigadier fut percé de sa propre baïonnette. M. Souesmes fut accusé de l’avoir tué, mais un témoignage qui paraît décisif, établit qu’un nommé Norest, mort des blessures