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CINQUIÈME PARTIE

Il les coupa donc, puis il me demanda ce qu’il fallait en faire. Il ne m’est pas venu à l’idée qu’il aurait pu me les acheter, nous étions si pauvres, cela nous aurait cependant rendu service.

— Faites en ce que vous voudrez, lui dis-je.

Cette opération me laissa tout à fait indifférente, car j’étais convaincue que nous serions tués ; ce qui m’a le plus impressionnée, c’est lorsque dans sa chambre, cette charmante personne, la femme du pharmacien m’aida à me déshabiller, je dois l’avouer, j’avais le cœur serré. Je portais à mon cou une petite chaine d’or avec un médaillon noir, cerclé d’or, dans lequel il y avait des cheveux de mes enfants. J’y tenais plus que tout au monde. J’ai laissé cette chaine et son médaillon entre les mains de ces excellentes personnes, ainsi qu’une bague que j’avais à mon doigt, les priant de bien vouloir, lorsque tout rentrerait dans l’ordre, faire parvenir à ma mère les dits objets, comme souvenir de ma dernière pensée pour elle.

C’est tout ce que je possédais, je leur indiquai l’adresse. Ils firent un paquet de mes effets, ils devaient les mettre en sûreté ; ils me dirent au revoir, espérant que je ferais une visite dans des temps meilleurs.

Depuis ce temps-là, bien souvent j’ai pensé à ces braves gens que je n’ai jamais revus. « Pourvu, me disais-je, que mes objets et mon costume n’aient pas été trouvés chez eux et qu’il ne leur soit arrivé aucun malheur. »

Lorsque nous fûmes ainsi équipés, je pris mon poignard (un cadeau que j’avais reçu de la 7me com-