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CINQUIÈME PARTIE

bourg St-Germain donnait la main aux soldats. Ils étaient enrôlés par leurs maîtres et armés pour sauver leurs propriétés, eux, les esclaves, étaient prêts à massacrer leurs frères (le peuple). J’ai connu des lâches qui ont passé tout le temps du siège, cachés dans une cave pour ne pas servir leur pays. Un entre autre qui était garçon de café, dans la rue de Beaune, en face du poste de police, n’est sorti de sa cave que pour dénoncer ma mère et moi, et plusieurs autres, sans doute, simplement parce que plusieurs fois je lui ai dit : Mais vous êtes un vieux garçon, pourquoi n’allez vous pas aux remparts ? c’est votre place, il y a tant de pères de famille qui y vont. Vous n’avez pas payé votre dette sociale, payez au moins votre dette patriotique.

Cet homme avait environ 35 ans, il était fort et robuste, mais il suintait la mollesse et la lâcheté. Pour ces paroles il nous a dénoncées à la prévôté du 7me secteur. Ce qui me valut à moi l’honneur d’une condamnation à mort par le conseil de guerre du 7me secteur. Je fus accusée de choses que je n’ai jamais faites, par exemple : d’avoir été à la Cour des Comptes pendant les évènements tragiques qui s’y sont passés ; je n’ai jamais été de ce côté dans ces moments-là.

Le service des Défenseurs de la République ne s’est pas effectué sur la rive gauche. Neuilly, Issy, Auteuil, Passy, Hôtel de Ville, la Bastille et ; voilà notre parcours, il m’était donc impossible de me trouver dans ce quartier, sauf deux heures environ que j’ai citées plus haut, lorsque j’ai failli être tuée par les employés