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CINQUIÈME PARTIE

m’étais engagée « Sortez, citoyenne ! Sortez au plus vite, la lutte est engagée entre nous et les Versaillais ; c’est inutile, vous ne pouvez pas passer, Passy est pris, ce n’est plus qu’un sauve qui peut. »

Dès que je fus sortie de cette ligne pour obtenir des renseignements, je suis allée à l’Hôtel de Ville où j’espérais retrouver quelques amis de la veille.

J’appris que Passy avait été pris au soleil levé, et sans coup férir, sans grande difficulté, ce qui ne m’a pas étonnée ; la défense des remparts était tellement défectueuse, ils n’étaient gardés qu’avec des pièces de canons démontées ; les pièces étaient misérables, sans munitions, le peu de gargousses qu’il y avait n’étaient pas de calibre.

Entre Paris et Passy, les Versaillais avaient groupé tous les agents de police, qu’ils avaient enrégimentés dans la garde nationale, ils firent un cercle de feu sur les fédérés qui cherchaient à fuir de Passy. Les fédérés à leur tour, tiraient sur toute la ligne ; se sentant perdus et trahis, ils entrèrent en une grande confusion ; beaucoup furent tués par les leurs sans que ceux-ci le sussent ou le voulussent.

La veille, j’avais laissé mon mari, mes amis et des malades dans l’ambulance de Passy. J’étais bien désolée que cela finît ainsi, comme j’ignorais ce qui se passerait le lendemain, on m’avait persuadé que c’était accomplir mon devoir que d’accompagner nos morts au cimetière, et j’y étais allée.

J’ai su plus tard que les soldats guidés par le sentiment chrétien avaient envahi l’ambulance de Passy,