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SOUVENIRS D’UNE MORTE VIVANTE

Je me suis fait inscrire à la mairie du 7me arrondissement ; étant de ce quartier, on me donna une vareuse, on la trouva bien, elle m’était payée 4 francs de façon, mais on n’en distribuait que trois par semaine et par personne, ce qui était juste, pour qu’il y eût un plus grand nombre de personnes occupées. Cela me faisait 12 francs par semaine pour quatre ; enfin nous pouvions nous suffire, des milliers de personnes n’en avaient pas tant. Les familles nombreuses, comment pouvaient-elles faire pour vivre ? Du reste ce travail fut de peu de durée.

Cela ne pouvait satisfaire mon désir d’être utile à ma patrie. Je ne pouvais résister au besoin absolu qui m’envahissait, d’entrer dans la lutte.

D’une façon ou d’une autre, je veux être utile à mon pays !

Dans le quartier, à nos heures libres, nous faisions de la charpie pour les blessés.

Poussée par mon idée fixe, je résolus de m’informer si je ne pourrais pas entrer dans une ambulance, si je n’avais pas eu mon fils et ma mère, assurément je serais partie avec mon mari dans l’armée de la Loire, restant à Paris où je suis indispensable, je verrais chaque jour mon cher petit et ma mère, ils ne seraient pas abandonnés, parce que je servirais mon pays !

Ma mère s’occupait des enfants, je nourrissais mon fils, mais je fus obligée de l’élever à la bouteille (dite biberon), je pouvais donc facilement m’absenter de la maison sans que rien en souffrît. Il nous restait environ 300 francs. Je pensais qu’en économisant, cela