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NOTICE

SUR LA VIE ET LES ŒUVRES

DE M. FRANCISQUE BOUILLIER[1]


M. F. Bouillier, quelques années avant sa mort, en écrivant les Souvenirs d’un vieil Universitaire, a devancé l’heure marquée par la tradition académique et composé lui-même sa notice biographique. Il songeait peut-être à son successeur, lorsque, en terminant, il parlait de cette main étrangère « qui n’aurait plus à ajouter qu’une date laissée en blanc ». Il voulait faciliter la tâche de celui qui le remplacerait, et il l’a si bien facilitée qu’il ne lui a rien laissé à faire. De ces pages écrites sans prétention et avec une évidente sincérité se dégagent une physionomie attachante et un portrait d’une exacte ressemblance. Il serait inutile de redire autrement ce que M. Bouillier lui-même a fort bien dit. Souhaitée et presque imposée par lui-même, la simple reproduction de ses paroles peut être littérale sans être servile et, puisque les circonstances ont voulu que l’honneur de lui succéder ici échût à l’un de ses anciens élèves, on y verra plutôt un dernier acte de docilité envers un maître respecté. Pour une fois, il sera permis au disciple de jurer sur les paroles de son maître. Aucun de ceux qui ont connu M. Bouillier ne soupçonnera qu’il ait été capable de trop de complaisance envers lui-même. Psychologue exercé et pénétrant, historien probe et scrupuleux, il s’est représenté tel qu’il s’est vu et il s’est vu tel qu’il était. On peut croire, même s’il fait son propre portrait, un philosophe qui n’a jamais flatté personne. L’Académie ne se plaindra pas de l’entendre encore une fois lui-même,

  1. Lue à l’Académie des sciences morales et politiques dans la séance du 10 novembre 1902.