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qui ne sont point encore parvenues à se dégager nettement, il n’est peut-être pas sans intérêt de rappeler qu’il a existé autrefois une doctrine morale étrangère aux idées directrices de notre morale d’aujourd’hui, et que cette doctrine a suffi, pendant une longue suite de siècles, à l’élite de l’humanité. Les modernes en ont condamné les idées essentielles : peut-être l’ont-ils fait trop sommairement, peut-être y a-t-il là un procès à réviser.

Bien entendu, il ne saurait être question de revenir purement et simplement à la morale ancienne. On ne remonte pas le cours de l’histoire. Mais ce ne serait point la première fois que l’esprit moderne trouverait profit à se rapprocher de l’esprit ancien et à revenir, après un long détour, à des points de vue abandonnés depuis longtemps. Nous en donnions un exemple au début même de cette étude.

Si les Grecs anciens n’ont peut-être achevé aucune science, ils ont posé du moins les fondements de toutes. Et cela paraît surtout vrai de la morale. Peut-être après tout, ce que les Éléments d’Euclide sont à la géométrie de tous les temps, ce que l’Organon d’Aristote est à la logique immuable, l’Éthique à Nicomaque l’est-elle à la morale éternelle.