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IV

LA MORALE ANCIENNE
ET LA MORALE MODERNE



I

Le temps n’est plus où l’histoire de la philosophie était considérée comme devant fournir des arguments à l’appui des opinions contemporaines. Elle est désormais une science distincte, ayant son objet propre qui est l’étude directe et objective des systèmes, mettant en lumière les différences qui les séparent des doctrines modernes aussi bien que les ressemblances. Toutefois, même ainsi envisagée, l’histoire des doctrines philosophiques peut rendre à la philosophie d’autres services que ceux qui, jadis, lui étaient demandés. D’abord, en définissant avec précision les caractères distinctifs de chaque doctrine, elle permet au philosophe moderne, grâce aux fréquentes oppositions qu’il découvre, de prendre une conscience plus nette de ses propres théories. D’autre part, il peut arriver, qu’en pénétrant ainsi, plus à fond, dans la pensée des anciens philosophes, on soit conduit, sur bien des points, à modifier ses propres idées. Avant d’aborder l’objet de la présente étude, nous voudrions présenter quelques exemples du genre d’influence que pourrait exercer, sur la pensée moderne, l’étude des philosophes anciens.

Commençons par l’idée de Dieu. Il semble que le mot Dieu, ou ses équivalents, ait dû être pris par tous les philosophes à