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I

LES ARGUMENTS DE ZÉNON D’ÉLÉE
CONTRE LE MOUVEMENT



Les arguments de Zénon d’Élée contre le mouvement ont été discutés bien des fois. Si c’était une raison pour n’y plus revenir, quel problème important de philosophie ne mériterait d’être délaissé ? Mais c’est moins la question métaphysique, si grave et en elle-même et par ses conséquences, que la question historique, que nous nous proposons d’examiner. Depuis l’époque lointaine où ces prétendus sophismes sont venus troubler et irriter la pensée humaine, il n’est peut-être pas un philosophe de quelque renom qui ait résisté à l’attrait du problème soulevé par la subtilité Éléatique, et qui n’ait dit son mot au moins sur l’Achille. Mais la plupart, jusqu’à notre siècle, se sont plutôt attachés à réfuter Zénon qu’à l’expliquer. Déterminer aussi exactement que possible le véritable sens de ces célèbres arguments dans la pensée de leur auteur, et sans nous interdire d’en apprécier la valeur, marquer avec précision le but auquel ils tendaient, voilà la tâche que nous nous sommes donnée.


I

Zénon, on le sait, partageait les idées de Parménide sur l’unité de l’Être ; il voulut venger son maître des railleries dirigées contre lui, et réduire à l’absurde les thèses qu’on lui