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INTRODUCTION

être un état déterminé en nous par la présence et l’action d’une vérité impersonnelle, qu’elle est un acte auquel concourent, outre des données intellectuelles, la passion et la volonté, qu’elle est en somme une espèce de croyance ; il avait énergiquement combattu le dogmatisme métaphysique qui tient la connaissance vraie pour une fidèle représentation de réalités existant en soi, et tâché de faire prévaloir à sa façon le principe, que tout objet de connaissance est relatif à la conscience. De cette doctrine Brochard fournissait brillamment la contre-épreuve en expliquant pourquoi la chimérique définition de la vérité, imposée par le dogmatisme, a pour conséquence l’impossibilité de rendre compte de l’erreur. L’erreur est plus qu’une simple négation ou privation ; elle contient des éléments positifs qui seuls peuvent faire qu’elle prenne, au moins un moment et pour nous, l’apparence de la vérité ; elle suppose des états de conscience et des combinaisons mentales qui sont des données et des actions réelles. La distinction de la vérité et de l’erreur ne saurait être ramenée à la distinction de l’entendement et des facultés sensibles ; car l’entendement entre autant dans la composition de l’erreur qu’il est incapable de constituer par lui seul des connaissances vraies ; comme il a besoin de l’expérience pour s’orienter vers le réel, il requiert le sentiment et le libre arbitre pour convertir ses idées en croyances. Retrouver dans l’erreur les mêmes facultés qui servent à l’affirmation de la vérité, ce n’est pas au reste supprimer la différence qu’il y a incontestablement entre la vérité et l’erreur ; c’est simplement la ramener aux proportions de notre esprit. Car il reste que les croyances vraies se distinguent des autres en ce qu’elles sont plus complètement motivées et soumises à un contrôle plus rigoureux ; seulement l’objectivité relative des méthodes de vérification ne saurait plus être assimilée, comme le veut le dogmatisme, à l’objectivité absolue d’une chose qui s’impose par son évidence et qui est censée faire l’esprit certain sans qu’il soit pour rien dans sa certitude. Au surplus, si l’erreur