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— Alors, pourquoi cette pose d’attente, on dirait que tu crois que je vais m’éloigner, je reste tu sais…

Et comme Alix penchée vers son frère continuait à le regarder vaguement, il dit :

— Sais-tu ce à quoi tu me fais penser en ce moment ?

— Non…

— À quelque chose d’inerte, une plume par exemple, placée près d’une lettre inachevée et qui attend qu’on la reprenne.

Inerte, elle ! oh non ! mais distraite par le merveilleux changement qui remuait son cœur. Elle éloigna l’enivrante obsession et retrouvant sa maîtrise :

— Tu es fou, mon pauvre garçon.

— Fou ? quelle sorte : lunatique ? maniaque…

— Ah, tu m’agaces à la fin, toi.

— Disons, fou clairvoyant, il y en a…

— C’est bien…

— Alors, c’est convenu, je suis fou clairvoyant. Tu ne me crains pas ? J’ai vu et je vois encore beaucoup de choses.

— Quoi encore !…

— Paul est-il ici ?

— Tiens… pour un homme qui se vante de tout voir, ce n’est pas fameux. Non, Paul n’est pas ici. Je croyais que tu venais me voir…

— Précisément, je viens te voir, et suis bien aise de te trouver seule, dit-il devenu sérieux. Seule, répéta-t-il en regardant Alix assise dans une causeuse