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adolphe brassard

volution. Les corps sont à bout, et les esprits tendus à la limite, l’endurance et l’abnégation ont une fin. On s’en rend compte, et, pour maintenir le moral des troupes, il y a des fusils de braqués sur elles et qui ne sont pas ceux de l’ennemi. Nous savons que, pour nous faire avancer sur la ligne d’en face, nous avons une ligne de feu dans nos dos…

La rumeur d’armistice nous a d’autant plus saisis que l’ennemi est visiblement vaincu. Les Allemands se défendent avec l’énergie du désespoir. Chaque obus tiré, chaque coup de feu, épuisent leurs munitions déjà épuisées. Chaque bouchée de nourriture avalée dégarnit leur mince garde-manger. Ils n’ont plus d’arrogance, et les os saillissent des uniformes. Et malgré leur dénuement à peu près complet et la dysenterie qui dissémine leurs rangs, ils parviennent encore à accomplir des prodiges de valeur. Leur kultur en a fait des guerriers mécaniques, et c’est ce