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les mémoires d’un soldat inconnu

— C’est affreux ! Est-ce que ce sont des Russes ?

— Ce sont des Autrichiens-Allemands.

Ses yeux se durcissent.

— Oh ! je les hais ! Ils ont tué mon père !

Mais le chagrin a raison de sa haine, et des larmes coulent sur ses joues qui gardent encore, il me semble, les traces des baisers maternels. Il essuie bravement ses yeux du revers de sa main. Je l’examine mieux. Il est grand pour son âge, d’une distinction parfaite, et son regard est si pur que je me sens comme purifié. Quelque chose de souverainement doux, de nouveau, monte en moi, et auquel je m’accroche. Oui, je protégerai cet enfant contre tout. C’est un but, ça. Et cette mission que je me donne m’apporte un contentement presque semblable à de la joie. Et pour commencer à le défendre, je ne veux pas que trop de haine prenne ce cœur innocent.