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adolphe brassard

nécessité de l’heure ne permettait plus de trier sur le volet. À grands coups de seine dans la plaine et les bas-fonds, on a ramassé la crème et la lie des populations du globe ; et tout ça se touche, se mêle et se confond. Et dans l’avalanche de saleté que soulèvent les champs de bataille, leurs tours et leurs alentours, nous paraissons tous pareils, sinon de fait, du moins d’apparence.

Je sais qu’il s’en trouve beaucoup qui prient, mais les canonnades enterrent leurs prières. On n’entend pas. Je sais que de belles vertus s’épanouissent malgré tout, mais la vertu est souvent timide : on ne la voit pas, on ne veut pas la voir.

Ça pressait, on a écumé les pavés, les prisons, et l’on se mêle à ça, et tout nous pousse à se mêler à ça.

***

Les mitrailleuses ponctuent les secondes ; les canons les minutes. Les heures d’angoisse suivent les heures de