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penser que la calommie ait assez d’empire pour anéantir, en un instant, quarante années d’une vie passée dans la pratique de la vertu et dans l’amertume de la douleur. Puisqu’on me réduit à parler de moi ; puisqu’il faut que je me fasse connaître, je vais, quelque répugnance que j’éprouve à le faire, vous retracer en peu de mots ma vie toute entière.

Née quelques années avant la Révolution, dans ce bouleversement général des personnes et des choses je fus par mes succès dans mes premières études, entraînée dans la carrière du théatre. Je la suivis sans que jamais les principes de l’éducation religieuse que mes parent m’avaient donnée en souffrirent la moindre atteinte. C’est Monsieur l’abbé Fleury qui avait dirigé mes premières idées vers la religion, il fut mon guide lorsque je reçus le sacrement de la Communion ; ce sacrement qui a une influence si marquée sur une âme vraiment chrétienne. Pour me soustraire aux séductions dont je me voyait environnée dans la carrière que j’avais embrassée, je sentis bientôt la nécessité de mettre ma vertu sous l’égide d’un époux. Alors tous les temples étaient fermés ; cependant je reçus le sacrement du mariage en présence de Dieu ; lorsque les autels se relevèrent, je m’empressai de me rendre au tribunal de la pénitence et depuis je n’ai cessé de remplir exactement les devoirs que la religion nous prescrit. C’est Monsieur l’abbé Caussin de la paroisse St Roch qui fut mon directeur ; depuis sa mort Monsieur L’abbé Dunepart veut bien m’assister