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faites sur les plantes, les insectes et les animaux, que les corps organiques de la nature ne sont jamais produits d’un chaos ou d’une putréfaction ; mais toujours par les semences, dans lesquelles il y avait sans doute quelque préformation[1] on a jugé, que non seulement le corps organique y était déjà avant la conception, mais encore une âme dans ce corps, et en un mot l’animal même ; et que par le moyen de la conception cet animal a été seulement disposé à une grande transformation pour devenir un animal d’une autre espèce. On voit même quelque chose d’approchant hors de la génération, comme lorsque les vers deviennent mouches, et que les chenilles deviennent papillons (§ 86, 89, Préf. ***, 5, b et pages suivantes[2], § 90, 187-188, 403, 86, 397).

75. Les animaux, dont quelques-uns sont élevés au degré de plus grands animaux par le moyen de la conception, peuvent être appelés spermatiques ; mais ceux d’entre eux qui demeurent dans leur espèce, c’est-à-dire la plupart, naissent, se multiplient et sont détruits comme les grands animaux, et il n’y a qu’un petit nombre d’Élus, qui passe à un plus grand théâtre[3].

  1. v
  2. Édit. Erdm., p. 475 b.
  3. On retrouve ici l’idée métaphysique, propre à Leibnitz, de la disproportion entre le possible et l’être, le possible n’étant soumis qu’à la condition de l’harmonie interne, tandis que l’être est soumis en outre à la condition de l’harmonie externe on compossibilité. Beaucoup d’appelés, peu d’élus, telle pourrait être la formule de la loi leibnitienne de la création comme du système moderne de la sélection naturelle. Mais Leibnitz s’efforce de montrer que les choses sont ainsi, non parce que les forces mécaniques règnent seules dans l’univers, mais, au contraire, en vertu de l’action bienfaisante d’un Dieu qui est législateur et père en même temps qu’architecte. Et, selon lui, si tel possible se réalise de préférence aux autres, ce n’est pas seulement parce qu’il est mieux armé pour la lutte, c’est encore parce qu’il est une pièce de l’harmonie universelle.