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et que c'est surtout des sciences qui doivent venir les dernières, médecine, mécanique et morale, que dépend l'utilité première de la philosophie . Et il n'est pas interdit à Descartes d'espérer se satisfaire sur ces objets suprêmes, malgré la brièveté de la vie humaine et les limites de notre intelligence, parce qu'il sait économiser ses forces et ne demander à chaque science que ce qu'elle peut et doit lui fournir pour l'exécution de son dessein. La fécondité de la connaissance réside dans sa clarté et sa distinction, non dans son étendue.

Mais à quelle morale ce progrès va-t-il aboutir ? Ne tend-il pas simplement à nous mettre en mesure de disposer de la nature humaine, grâce à la science de l'homme, comme nous disposons de la nature corporelle grâce à la science des corps ? Une mécanique psychique, n'est-ce pas tout ce que Descartes a en vue ? Et, de fait, Descartes a jeté les fondements d'une telle morale dans son Traité des Passions, où, en en découvrant le principe, il nous apprend à les dresser et à les conduire. Comme, d'ailleurs, cette étude même nous montre à quel point l'esprit dépend du tempérament et de la disposition des organes du corps,