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n'aurait ajouté ces règles que malgré lui, à cause des pédagogues et autres gens de même espèce, qui sans cela l'auraient accusé d'être sans religion et sans foi, et de vouloir renverser l'une et l'autre par sa méthode. Quant au contenu de ces écrits, il est certes très élevé de pensée et admirable de forme, mais il parait peu en rapport avec la propre doctrine du philosophe. Emprunté, selon Baillet, à saint Thomas, destiné, d'après ce qu'en dit Descartes lui-même, à concilier Aristote, Zénon et Épicure , il apparaît comme particulièrement empreint de stoïcisme. Or le stoïcisme était courant alors. Descartes est stoïcien, comme les héros de Corneille. Sa mathématique n'y est pour rien. Il semble donc, ou que Descartes se soit, quant à lui, désintéressé des recherches morales, ou que, s'il a professé [503] des maximes en cette matière, elles procèdent de sentiments individuels ou d'influences extérieures, plutôt que du développement logique de sa philosophie.

Il est remarquable que cette appréciation, à laquelle nous induit un premier examen des écrits moraux de Descartes, n'est nullement conforme aux déclarations sans cesse renouvelées du philosophe sur l'objet de la philosophie.