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déduites de la volonté divine, en tant que cette volonté veut se manifester et se poser comme personne. Point de manifestation sans opposition. Dieu pose donc son contraire, afin de se saisir, en se distinguant de lui et en lui imposant sa loi. Ce contraire, ou nature éternelle liée à l’existence même de Dieu, sans être lui-même le fini et le mal, en fonde la réalité. Le fini est la dissémination librement opérée par Dieu, au moyen du temps, des essences contenues dans la nature divine. Le mal, c’est la nature, laquelle n’est qu’une partie, posée comme le tout par la volonté libre des êtres créés. Le fini et le mal, en définitive, se déduisent, quant à leur matière, des conditions d’existence de la personnalité, tandis que, pour ce qui est de la forme et de la réalisation sensibles, ils résultent de la libre initiative de la volonté. Ainsi le monde est tout autre chose qu’un simple non-être ou que l’effet sans consistance d’un acte de volonté arbitraire : il a une réalité, une existence interne et véritable : il n’est pas Dieu, mais il est fondé en Dieu : il repose sur la nature même dont Dieu a besoin pour se manifester.

On ne saurait nier qu’il y ait dans ces idées, clairement exprimées par Boehme à travers toutes ses métaphores, les germes d’un système philosophique. Mais quelle est la valeur et la signification de ce système ? N’est-ce pas une œuvre isolée, sans relation importante avec l’histoire générale de la philosophie ?

Il faut bien le dire : si l’on excepte le célèbre philo-