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lytique est le premier péché, celui de l’entendement. C’est une pente dangereuse, car voici que l’homme conçoit maintenant le mal et, par suite, est susceptible de le vouloir ; mais ce n’est pas encore la chute, puisque l’homme possède la faculté de choisir entre le bien et le mal.

Cependant, à la première tentation en succède une seconde. Jusqu’ici Adam avait pour compagne la Vierge éternelle ; jusqu’ici l’image de Dieu ou l’idéal était l’objet de sa pensée. S’étant mis à considérer les choses du point de vue de l’analyse, sous leur forme terrestre, il s’éprit du monde de forces et d’instincts qui dès lors s’offrait à son regard. Il voulut vivre de la vie animale, et se reproduire à la manière des bêtes. Devant la passion qui s’allumait en lui, l’image de Dieu s’effaça, la vierge s’envola. Alors Adam s’endormit ; car il n’en est pas de l’image du monde comme de l’image de Dieu. L’image de Dieu, qui ne dort pas, tient constamment en éveil l’esprit qui la contemple. Mais l’image du monde, qui est sujette à la succession, fatigue la vue et engendre le sommeil. Un changement de condition se produisit alors. L’homme s’était endormi dans le monde des anges et de l’éternité : il se réveilla dans le temps et dans le monde extérieur. Et il vit devant lui, sous la forme d’une femme créée par Dieu pendant son sommeil, l’objectivation humaine de son désir terrestre. Comprenant que la femme venait de lui, l’homme chercha à se réunir à elle, et à s’y réunir selon le corps.