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premier principe est le fonds des trois premières qualités, ou de la nature livrée à elle-même. C’est l’obscur ou le feu latent attendant l’étincelle pour se manifester. Boehme l’appelle d’ordinaire le feu. Le second principe est le fonds des trois dernières qualités, c’est-à-dire de la forme ou expression de la sagesse idéale. C’est le principe de la lumière. Chacun de ces deux principes est éternel, et en un sens ils s’excluent l’un l’autre. Le feu n’admet aucune borne et dévore tout ce qu’on lui oppose. La lumière est l’absolu de la douceur et de la joie, la négation des ténèbres, le terme de toute aspiration. Celui-là est la vie du tout ou de l’infini indéterminé, celle-ci est la vie de Dieu ou de l’un excellent et déterminé. Cependant ni l’un ni l’autre de ces deux principes ne peut se suffire. En vain le feu veut-il être le tout : il n’est qu’une partie. En vain la lumière dédaigne-t-elle les ténèbres : elle ne se réalise qu’en se détachant sur l’obscur. C’est pourquoi un troisième principe est nécessaire, qui unisse le premier au second, de manière à produire l’existence véritable. Ce troisième principe est le corps. Par lui l’esprit s’incarne dans la matière et devient réel et vivant. Cette union du premier principe au deuxième n’est d’ailleurs pas une absorption complète, et les trois principes demeurent irréductibles. En effet l’opération qui range le feu sous les lois de la lumière n’anéantit pas le fondement même du feu. L’infini de la vie subsiste sous la forme de perfection qui la détermine. Le commandement divin ne s’adresse pas à